Taina Orth, championne de chasse sous-marine
Découverte de la pêche sous-marine à l'âge de 15 ans
Née d’un père américain et d’une mère marquisienne, Taina Orth grandit et fait ses premières années de scolarité à Moorea avant de poursuivre à Papeete au Lycée Paul Gauguin. Après l’obtention d’un baccalauréat littéraire en 1999, elle fait des études d’anglais à l’Université française du Pacifique pour devenir professeure d’anglais. C’est à 15 ans qu’elle commence à pratiquer la pêche sous-marine avec son père sur l’île sœur.
« Mon père, biologiste marin, allait souvent observer les poissons dans le lagon de Teavaro, en face de notre maison. Il attrapait quelques espèces pour les mettre dans un aquarium. J’apprenais alors avec lui le nom des poissons en langue tahitienne, hawaïenne, française, … C’est également lui qui m’a fait découvrir la pêche sous-marine. J’ai commencé à pêcher du maito, plus facile à attraper, avant de m’attaquer à d’autres espèces. C’est ensuite en m’installant à Maupiti pour enseigner l’anglais que j’ai commencé à me mettre pleinement à la pêche. »
Faire sa place dans un milieu masculin
En 2012, elle rencontre Onyx Le Bihan, sa coéquipière actuelle en sélection de Tahiti, avec qui elle partage sa passion. Les deux pêcheuses décident de faire équipe pour présenter pour la première fois une équipe féminine au championnat de Polynésie en 2013 avant de gagner la compétition d’Océanie chez les femmes en 2014.
« Ça a été très dur de faire sa place dans ce milieu parce que c’est très masculin et très physique. Il n’y avait pas d’autres équipes féminines au championnat de Polynésie mais on s’est dit qu’il fallait qu’on se mesure aux mêmes conditions que les hommes afin de comprendre ce que c’est que la compétition. Il fallait prouver qu’on était des athlètes accomplies. On voulait pour cela côtoyer les meilleurs de la discipline pour pouvoir progresser. Après notre titre en 2014, on a décidé de participer à tous les Oceania et à tous les championnats de Polynésie. On s’était dit que tout était possible. »
Trois fois championne d'Océanie
« C’est une première dans l’histoire de Tahiti puisqu’on est la première équipe féminine tahitienne à participer à une compétition mondiale de pêche sous-marine. Notre objectif est de faire de notre mieux et si possible de monter sur le podium. Ce championnat va se dérouler dans un autre milieu marin avec des conditions vraiment différentes. On appréhende un peu mais on est conscientes des points sur lesquels on doit travailler à l’entrainement. On a encore du temps pour se préparer. »
La pêche sous-marine : une passion
« Ce que j’adore dans la pêche, c’est le fait d’aller chercher moi-même ma nourriture sans avoir à aller en acheter au magasin. J’aime aussi me retrouver avec d’autres personnes en mer afin de partager cette passion. Être sous l’eau, c’est aussi un moment privilégié où tu te déconnectes de cette vie à 100 à l’heure et tellement stressante. Quand je reviens d’une journée de pêche, je me sens zen et vraiment reposée même si je suis en mode chasse sous l’eau. »
Pour une pêche durable et respectueuse de l'environnement
« « La surpêche est un problème que l’on constate depuis un moment. On voit que les gens pêchent tout et n’importe quoi. Ils vendent leurs poissons au bord de la route sans se préoccuper de la taille des espèces. Il y a un peu de gaspillage. Je pense qu’il faut que l’on préserve notre environnement en pêchant de manière raisonnée et durable de sorte que nos enfants aient encore du poisson à manger à l’avenir. On se doit d’ailleurs de pratiquer une pêche sélective dans les compétitions locales et océaniennes en respectant les espèces de poissons à pêcher, leur taille, leur poids sans quoi, on est pénalisé. »
Création de l'association To'a Hine Spearfishing
« Nos principales actions sont axées sur le développement de cette discipline chez les femmes en organisant des formations. On met en place des sessions d’initiation à la pêche sous-marine, à l’apnée, à la nage avec palmes, … On organise aussi des camps de vacances pour les adolescents ainsi que des formations au sein des comités de pêche de Moorea. On mène aussi des actions de sensibilisation auprès des élèves des écoles primaires, des collèges et des lycées. Sur le plan sportif, on propose des séances d’entrainement pour les athlètes novices ou confirmés afin qu’ils deviennent meilleurs. »
Encourager les vahine à pratiquer la pêche sous-marine
« Je veux dire aujourd’hui à toutes les femmes qu’elles sont fortes et qu’elles peuvent même aller pêcher du poisson dans le lagon. Elles doivent se sentir capables de réaliser beaucoup de choses dans la pêche sous-marine, et même être compétitives dans les championnats. Il faut juste qu’elles soient courageuses et qu’elles se donnent les moyens pour pratiquer ce sport. C’est faisable si elles sont bien encadrées. On est justement là pour elles. »
Rédacteur
©Photos : Toatane Rurua et Taina Orth pour Femmes de Polynésie
Directeur des publications : Yvon BARDES