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    Portrait

    Tehei, l’ange gardien des enfants de Maupiti

    Publié le 18 novembre 2021

    Elle est l’authenticité polynésienne à l’état pur… Tehei est originaire de Maupiti. Depuis sa nomination en tant que présidente de l’association Maurua i tera ra manu en 2020, elle a tout donné pour élever la jeunesse de Maupiti. Femmes de Polynésie vous brosse le portrait d’une petite femme à la force de caractère immense.

    Affalés sur les matelas éparpillés dans les grandes salles du Fare Amuira’a de Arue, ils ressentent la fatigue du voyage. Ils, ce sont les 38 membres de l’association Maurua i tera ra manu de Maupiti que Tehei préside. Quelques mois auparavant, sa sœur, Emeraude, lui avait demandé de devenir présidente du bureau . Dès l’instant où elle a accepté, Tehei s’est donné corps et âme pour mener à bien les projets culturels de sa nouvelle association.

    « Quand je me lance, je vais jusqu’au bout. »

    Une leadeuse

    Passionnée de danse, elle avait déjà remarqué les shows de ce groupe de Maupiti qui montait sur scène pour le plaisir.

    « Quand j’ai vu le spectacle, ça m’a énormément touchée. En plus, il n’y avait que des jeunes ! J’ai eu envie de les aider.  »

    Et c’est ce qu’elle a fait. Elle voulait guider ces talents, les mener loin. Très vite, elle est devenue leur pilier. Tehei visait le Hura Tapairu1 : il lui restait moins de trois mois avant novembre 2020 pour tout mettre en place.

    « Au début on n’avait rien, zéro !  »

    Il fallait collecter huit millions de francs pour participer au spectacle à Tahiti. Dans sa quête, Tehei s’est imposée en parfait leader ; son mari, le bureau de l’association, les jeunes et même la commune – tout le monde l’a suivi.

    « On a commencé par des ventes de plats et on allait pêcher. Pahua au curry, poisson cru taioro ou en beignets étaient au menu. Les gens achetaient, mais cela ne suffisait pas. »

    Alors Tehei a pensé produire son pain coco, une fois par semaine, en plus des ventes de plats. Et lorsque Maupiti est devenue trop petite, elle a organisé les livraisons dans d’autres îles. Rien ne l’a freinée pour atteindre son objectif.

    Continuer d’avancer

    Les jeunes cuisinaient, vendaient, livraient et enchainaient les répétitions pour le Hura Tapairu.

    « Certains tombaient de fatigue ! Mais on a continué. Tout le monde avait hâte de partir ! »

    Puis l’annonce est tombée, comme un gros coup de massue : à dix jours du spectacle, le Hura Tapairu est annulé. Ils l’avaient presque oublié, ce covid. Mais Tehei n’a pas changé de cap.

    « Je me suis dit qu’il fallait trouver une solution. »

    Après tant d’efforts, elle allait les faire partir, ces jeunes, même à l’autre bout du monde. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, elle a trouvé un nouvel événement aux Etats-Unis – le Taste of Tahiti. Elle avait besoin de deux millions supplémentaires pour emmener sa troupe à Los Angeles – 38 personnes exactement.

    « Et là, c’est reparti ! On a revu la chorégraphie, repris les répétitions et les ventes. Tout le monde s’est remis au travail.  »

    Tehei a réalisé que les clients n’étaient pas assez nombreux dans les îles. Pour pallier ce manque, l’association a délocalisé son « usine » de pains coco. Un groupe s’est déplacé à Tahiti avec la recette et les ventes ont explosé – près de 200 par jour. Le pain coco de Maupiti est devenu emblématique.

    La polynésienne est allée jusqu’à monter son propre restaurant, pour offrir un travail à 17 jeunes de l’association en situation de précarité.

    « Je me suis dit que les jeunes auraient besoin de sous pour faire leur shopping aux Etats-Unis. »

    En six semaines, les recettes du restaurant ont franchi la barre des 5 000 000 cfp.

    Propriétaire d’une pension de famille, Tehei a délaissé son activité professionnelle. Elle n’a d’ailleurs pas hésité à puiser dans les caisses de son business pour compléter les fonds de l’association.

    Y croire​

    Au beau milieu de tout cela – le restaurant, les répétitions et le voyage en perspective – Tehei et Cliff, son compagnon depuis près de 20 ans, se sont mariés le 10 juillet 2021. Un mariage de 800 convives, ça ne s’improvise pas.

    Une semaine plus tard, Cliff, victime d’un AVC, est évasané à Tahiti. Il est pourtant en bonne santé : les médecins accusent la fatigue. Tehei reste auprès de lui. En moins de temps que prévu, Cliff est de nouveau sur pieds.

    « Notre motivation, c’était les jeunes qui croyaient en nous. Ils sont devenus comme des enfants pour nous. »

    Finalement, les jeunes de l’association ont décollé pour les Etats-Unis en octobre 2021. Ils ont pu découvrir Los Angeles et promouvoir l’île de Maupiti. Et il a suffi d’un seul ange gardien pour leur montrer que la détermination et le travail d’équipe peut mener bien plus loin qu’on ne le croit…

    Mereini Gamblin 

    Rédactrice

    ©Photos : Mereini Gamblin et Tehei Taputu pour Femmes de Polynésie

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