Kahaia, des ailes qui protègent
Si on lui avait dit qu’elle allait être engagée dans l’armée de l’air, Kahaia ne l’aurait jamais cru. Son parcours témoigne de cette vérité que la vie n’est pas un long fleuve tranquille mais l’on apprend de ces expériences à aimer les opportunités qui s’offre à nous. C ’est donc près d’Orléans, à la base aérienne de Bricy, que Femmes de Polynésie découvre ce petit bout de vahine.
De Tahiti…
Issue d’une famille de 4 enfants, elle se destine tout d’abord à la comptabilité en décrochant un BEP suivi d’un bac pro. Elle poursuit ses études à l’université de Polynésie Française en licence de langues.
« Je viens d’une grande famille d’artistes. Mon père était musicien et producteur de musique et ma mère chanteuse. J’ai baigné dans cet univers dès mon plus jeune âge. »
Sa fibre artistique se réveille et, parallèlement à sa licence de langues, elle entame une prépa de graphisme. Lui permettant ainsi d’apporter son aide à la maison de disque familiale, notamment dans la création des pochettes d’albums de sa mère. Elle achève avec succès son année, lui ouvrant les portes de grandes écoles en France. Cependant, ses études étant trop onéreuses, son rêve doit être mis de côté.
« Ma motivation d’étudiante en a pris un coup ! Mon rêve de faire de hautes études en graphisme partait en fumée. »
À la Métropole…
21 ans, mariée et mère d‘une petite fille, elle décide de suivre son mari militaire dans l’armée de l’air. C’est donc avec ses deux valises, un lit parapluie et son enfant qu’elle commence sa nouvelle vie dans un pays inconnu. Elle se retrouve loin des siens, dans un appartement vide et un mari peu présent.
« C’est la dure réalité des épouses de militaires. On se retrouve seule quand son mari est en mission. »
Le grand chamboulement
Deux ans plus tard, sa fille entre à l’école et Kahaia décide de trouver un travail. Cependant, elle se heurte à de nombreuses difficultés de nature administratives.
« Venant de Tahiti, il faut se créer son identité en France. Il faut refaire tous ses papiers et si on ne va pas chercher les informations, on ne sait pas comment faire. »
Après ce passage à vide, elle découvre que l’armée de l’air recrute et décide de se lancer dans l’aventure. Elle rate son examen d’entrée plusieurs fois mais, à force de persévérance, Kahaia y parvient et devient militaire du rang, seule tahitienne sur 200 élèves pour ses classes.
Désormais sur une base aérienne, elle doit quitter Ambérieu-en-Bugey sans son mari qui doit rester sur sa base d’origine. Elle demande durant trois années consécutives un rapprochement de conjoints, en vain, jusqu’en février 2014. Elle apprend à devenir secrétaire ops1 et rencontre un nouvel obstacle.
« On m’a dit que mon accent était trop fort et qu’on ne me comprenait pas. J’ai souvent été moquée ou mise de côté à cause de ça. »
Néanmoins, elle finit ses classes avec brio et devient marqueuse² confirmée à l’escadron d’instruction en vol « 3/13 AUVERGNE » à l’école d’aviation de chasse de TOURS . Un milieu majoritairement masculin et pluriculturel.
Petite vahine devenue grande
Mai 2014, elle accueille un petit garçon et quelques mois plus tard, leur demande de rapprochement de conjoints est acceptée. Le couple déménage alors pour Orléans et elle est affectée à l’équipe précurseur du tout premier escadron de transport A400M en tant que secrétaire OPS.
En septembre 2015 elle devient la première préparatrice de mission³ polynésienne en étant mutée au CESAM4. Elle participe notamment au déploiement de l’A400M aussi bien pour des missions logistiques que sanitaires. Des Antilles après l’ouragan Irma (2017), en Polynésie française pour l’envoi de matériel médical de la COVID-19. Mais aussi à Beyrouth, suite aux explosions d’août 2020, où elle s’est particulièrement distinguée en recevant les félicitations de son commandant de base.
« Je suis fière d’avoir pu aider mon Fenua, même en étant à des milliers de kilomètres. »
Au-delà des difficultés, grâce à une grande force de persévérance et de travail, Kahaia n’aura jamais dépéri, elle aura bâti la vie telle qu’elle l’entend. Et de chez elle, entourée de ses enfants et de son mari, Kahaia témoigne qu’il est possible d’aller loin, même en partant de peu.
« Dans la vie, on n’a rien sans rien, il faut être curieux et ne pas avoir peur de se poser des questions pour avancer. »
1 S’occupe du suivi des heures de vols Pilotes et Aéronef dans un escadron de transport
2 S’occupe du suivi et des heures de vols PILOTES et AERONEF dans un escadron de chasse, des mouvements aéronef sur la plateforme à la tour de contrôle ou encore assiste le Directeur des VOLS à la direction des vols.
³ Manipule des données dans le but d’établir un LOG et un plan de vol valide pour l’Exécution de la mission en coordination avec le commandant de bord et l’équipage.
4 Centre de Soutien et d’Administration des systèmes Missions
Ninou
Rédactrice
©Photos : Kahaia pour Femmes de Polynésie