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Victorine Tihopu, vegan depuis 20 ans

Publié le 23 novembre 2022

Ébranlée par la maladie, Victorine a changé radicalement de régime alimentaire. Aujourd’hui, cette femme de 64 ans au doux regard accueille Femmes de Polynésie dans sa pension de famille sur Raiatea. À Tevaitoa, le long de la rivière, elle partage ses connaissances végétales avec ses invités lors d’ateliers culinaires et de repas surprenants.

C’est dans la vallée de Tepuhapa où elle vit actuellement que Victorine passe une enfance buissonnière. Ses parents y avaient construit une maison tout en bambou, toit, murs, lit et jusqu’aux tuyaux qui acheminaient l’eau de la rivière. À la naissance de Victorine, la famille de 8 enfants s’installe plus bas, en bord de mer ; le fond de vallée devient alors un formidable garde-manger avec, outre le potager, un champ d’ananas, une vanilleraie…

Après la Nouvelle-Calédonie et les Australes, Victorine s’installe à Tahiti où elle se consacre à ses trois enfants, développant sans nul doute sa passion pour la cuisine.

Sa lutte contre le cancer

À 40 ans, le couperet tombe : atteinte d’un cancer du sein, Victorine n’aurait pas plus de deux mois à vivre, selon les médecins.

« Je suis une rescapée, confie-t-elle. Après le choc de cette nouvelle, j’ai décidé de lutter pour mes enfants. »

Victorine se régale du mucilage des grains de cacao, juteux et sucré.

Soutenue par sa maman très croyante, Victorine s’en remet à Dieu et reprend confiance dans la religion qu’elle pratique aujourd’hui.

Découverte du régime vegan

En parallèle d’un lourd traitement qui dure six longues années, elle s’intéresse à l’alimentation. Forte de nombreuses lectures, Victorine change son alimentation du tout au tout.

Variété de trèfle qui se mange intégralement : fleur, tige, feuilles au goût de citron / Même la fleur de tiare taina est employée en tisane délicatement parfumée par Victorine qui la plonge entière dans de l’eau frémissante.

« J’ai découvert que certains produits favorisent le cancer. À commencer par les produits laitiers, moi qui mangeais quantité de yaourts à l’époque ! Je me souviens qu’enfant, on nous obligeait à l’école à boire du lait de vache ; de fil en aiguille, ma famille s’était mise à acheter du lait en poudre, mettant de côté le lait de coco ! »

Une aberration selon elle. Elle élimine alors progressivement les produits laitiers, la viande, les œufs, l’alcool et privilégie les farines sans gluten.

« Le plus dur, c’était le poisson, avoue-t-elle, parce que j’ai grandi rattachée à la mer, en mangeant la pêche de mon papa. »

Rose de porcelaine… blanche. Savez-vous que ses pétales sont comestibles ?

En 2010, Victorine se réinstalle seule à Tevaitoa, exactement sur les terres de son enfance.  Mais le terrain est en friche, la maison rasée. Elle repart de zéro, monte un fare OPH et, surtout, redonne naissance à un riche fa’a’apu étonnant de diversité.

Le jardin des merveilles

Outre les fruits bien connus, Victorine fait pousser mûres, prunes du Brésil, noix de cajou, cerises, pommes roses, mangoustan jaune, ramboutan, cacao, tamarin, pakai dont la pulpe blanche et moelleuse lui rappelle son enfance. Au potager, elle couve d’un œil tendre ses chouchoutes, tomates, aubergines, haricots verts et le chou kanak, arbuste dont les feuilles se consomment crues ou cuites comme des épinards. Le travail ne manque pas, les limaces non plus qui grignotent par ci, par là. Pour autant, Victorine n’utilise aucun subterfuge, ni répulsif, ni engrais. Elle s’en remet plutôt à la lune, plantant à la pleine lune, faisant ses semis à la nouvelle lune. Contournant son carré d’aromates : coriandre, citronnelle, basilic, ciboulette, piment doux, curcuma, gingembre… elle effleure de la main un plant d’arachides et s’exclame :

« Je rêve de faire mon propre beurre de cacahuètes, mais je manque de temps. »

Et oui, car, outre de nourrir ses fruits et légumes, elle doit aussi rassasier quelques dizaines de bouches adeptes de sa cuisine surprenante.

Cuisine et indépendance

Le mode de vie de Victorine repose sur l’énergie solaire, l’eau de la rivière, une alimentation locale exclusivement végétale et une exposition faible aux ondes électromagnétiques. De retour d’Inde où elle voit la misère de nombre de femmes, sa fille Eva la convainc de montrer son quotidien basé sur l’autonomie en accueillant des gens chez elle. Aujourd’hui, Victorine partage, au sein de sa pension de famille The Niu Shack, sa passion pour une nourriture saine, légère et joyeuse. Qu’il s’agisse d’inventer un repas de fête pour une vingtaine de convives, de préparer le dîner de ses hôtes ou bien d’animer des « cooking class », Victorine est toujours en vadrouille entre la cuisine et son fa’a’apu. À la voir si svelte et si énergique, on est convaincu que ses petits plats sont le gage d’une grande santé !

Gaëlle Poyade

Rédactrice

©Photos : Gaëlle Poyade et The Niu Shack pour Femmes de Polynésie

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