Capucine, responsable de l’incubateur de projets polynésiens PRISM
Aujourd’hui bien connu des entrepreneurs locaux, PRISM aura incubé une ribambelle de projets tous aussi innovateurs les uns que les autres. Pourtant, à ses débuts en 2017, Capucine, sa fondatrice, est loin de son fenua natal et de l’entreprenariat innovant en Polynésie. Avec la responsable du programme, Femmes de Polynésie parle d’économie circulaire1, collaborative2 et d’économie bleue3.
D’ici et ailleurs
Ayant grandi en Polynésie, Capucine a le mal du pays quand elle part faire ses études supérieures en France.
« Après la prépa HEC, j’ai intégré ESC La Rochelle. Le changement a été radical, et comme beaucoup de polynésiens, dans un premier temps, ça a été un peu dur. »
Après quelques années de stages éparpillés dans le monde et une mission humanitaire au Cambodge, où elle va enseigner l’histoire et perfectionner son anglais, Capucine vit en Pologne. C’est à Varsovie qu’elle découvre le monde des start-ups.
« J’ai vraiment vécu l’aventure start-up. Quand je suis rentrée, on était 8 et quand je suis partie, on était une trentaine. La croissance de la start-up était très intense. »
S’ensuit une seconde aventure à Barcelone. Puis un « gap-year ».
« Mon compagnon et moi avons décidé de prendre du temps pour voyager. On a fait beaucoup de pays de l’Amérique Latine et de l’Asie avec un budget très réduit. Une grosse aventure qui nous a fait grandir. »
Les débuts de l’aventure
En 2017, encore en plein milieu de son voyage en Asie, Capucine, interpellée par sa sœur, répond à une offre d’emploi de la CCISM. Sur près de 80 candidatures, 1 poste à pourvoir. Avec Capucine comme responsable, l’aventure PRISM peut commencer.
« C’était une première sur le territoire, du coup la CCISM s’est fait accompagner par Makesense4 pour développer son propre incubateur. »
La même année, Capucine part faire une formation de 3 semaines à Paris avec l’équipe de Makesense et dans la foulée, PRISM est créé. L’incubateur de start-up commence avec un premier appel à projets dès avril 2017.
Pour Capucine, PRISM est avant tout un incubateur de projets innovants. Start-up ou pas, les objectifs restent clair : la création d’emplois et la création d’activités économiques.
« Et les bons exemples existent. Foodease, Hello Scoot, Speak Tahiti et beaucoup d’autres, ont été avant tout des idées qui se sont concrétisées grâce à l’ingéniosité de leurs créateurs mais aussi grâce au programme de l’incubateur. »
L’entreprenariat, une question de vision
À l’ère de la réforme des modèles sociaux et économiques classiques, de par ses richesses et sa situation géographique, la Polynésie a toutes ses cartes à jouer.
« L’économie circulaire, l’économie collaborative et l’économie bleue, sont des concepts récurrents au sein de l’entreprenariat innovant. Bien qu’avant, le Graal c’était de rentrer dans l’administration, aujourd’hui, les mœurs changent. On peut compter sur nous-même et le potentiel est énorme. »
Un message positif qu’on ne pourrait qu’allier à l’indéniable sincérité dont Capucine fait preuve.
« L’entreprenariat ce n’est pas pour tout le monde. Les entrepreneurs ont une relation avec le risque assez spéciale. Ils n’ont pas peur d’en prendre et savent les mesurer adéquatement. »
Les créateurs qu’elle soutient et qui font partie de la grande famille PRISM, Capucine en est la première fan.
« Je travaille avec des gens qui se bougent, ce sont des créateurs. Avec PRISM, les choses changent. Pour moi, Ils sont des modèles de l’innovation. »
Capucine voit l’entreprenariat avant tout comme le devoir de répondre à des questions. Car pour tout problème, il faut des solutions.
« Avec ce type de modèle économique, nous opérons un tournant au profit de l’environnement. De façon générale, les polynésiens ne voient pas l’international mais avec un produit entièrement dématérialisé, on peut rendre l’international une réalité. »
PRISM vient en aide aux porteurs de projets de tout horizon et tous types d’ambitions. La meilleure des méthodes reste le test.
« Ici, nous faisons en sorte de donner tous les outils nécessaires à l’accomplissement des projets. Cette période d’incubation est l’opportunité de tester un marché, et dans certains cas, voir si un marché existe. »
Avec les promotions5, l’incubateur créé des liens entre les porteurs de projets. Ils rencontrent des personnes avec la même mentalité et partagent beaucoup d’idées différentes. C’est une communauté dont le mot d’ordre est l’entraide.
« Une entreprise qui réussit c’est une entreprise qui se concentre sur le besoin client. Il faut toujours essayer de mener ses idées le plus loin possible, d’être dans l’action. Arrêtons de penser qu’on est moins bien lotis en Polynésie. On a tout ce qu’il faut pour réussir. »
1 L’économie circulaire vise à changer de paradigme par rapport à l’économie dite linéaire, en limitant le gaspillage des ressources et l’impact environnemental, et en augmentant l’efficacité à tous les stades de l’économie des produits.
2 Il s’agit du recours à des plateformes en ligne alternatives privilégiant les transactions entre particuliers.
3 Une économie qui prétend suffire aux besoins de base en valorisant ce qui est disponible localement et en s’inspirant du vivant. Elle se fonde sur les principes de l’économie circulaire, tout en considérant les déchets comme dotés de valeur.
4 Une organisation qui crée des outils et des programmes de mobilisation collective pour permettre à tous et à toutes de passer à l’action et de construire une société inclusive et durable.
5 L’incubateur PRISM accompagne une promotion de porteurs de projets par an.
Niuhiti Gerbier
Rédacteur
©Photos : Niuhiti Gerbier pour Femmes de Polynésie