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Carrière

Vaihiti : comprendre nos eaux pour mieux les protéger

Publié le 4 juin 2024

C’est au gré des embruns, sur la côte ouest de Tahiti Iti que Femmes de Polynésie part à la rencontre de Vaihiti Teaniniuraitemoana, chercheuse pour le Centre Ifremer du Pacifique1. Notre entrevue se déroule au son des vagues et des prises de parole des mo’o, alors que nous apprenons à découvrir cette jeune femme qui, comme beaucoup d’autres de sa profession, travaillent dans l’ombre pour comprendre nos lagons, nos océans et ainsi protéger leurs habitants. 

Un attrait pour le vivant

Vaihiti est originaire de l’île de Tahiti. Elle passe son enfance auprès des siens, libre de découvrir cette nature qui l’entoure et la submerge de curiosité. 

« J’ai toujours été attirée par le vivant. Plus jeune déjà, j’étais très observatrice de tout ce qui nous entourait. »

Cet intérêt pour son environnement ne la quittera jamais, c’est même ce qui la guidera à choisir ses études dès le lycée. 

« Même lorsque j’étais en terminale S, ce que je préférais c’était la biologie bien que ma spécialité choisie était la physique-chimie. »

Un parcours riche d’apprentissages

À peine âgée de 18 ans et le bac en poche, elle part loin de sa famille et de tout ce qu’elle connaît par cœur pour s’aventurer sur le vieux continent. 

« Je suis partie faire une licence de biologie à Strasbourg. Puis lorsque je l’ai terminé, j’ai fait un master en écologie aquatique, à Bordeaux cette fois. »

De réussite en réussite, Vaihiti prouve sa valeur en tant qu’élève à l’université et est choisie pour réaliser une thèse au Centre Ifremer du Pacifique à Vairao. Cette dernière porte sur la reproduction de l’huître perlière. Grâce à cette expérience, elle valide son doctorat à l’Université de Polynésie Française. 

Suite à ce succès, la scientifique n’est pas à court d’idées ni de soif d’apprendre. Elle est prise pour un contrat post-doc2 en Nouvelle Calédonie à l’Institut de Recherche pour le Développement. C’est là qu’elle travaille sur l’algue rouge calcaire3, un élément indispensable à la santé de nos récifs. 

« On dit souvent que ce sont les coraux les bâtisseurs des récifs, mais l’algue rouge calcaire c’est vraiment le ciment. Elles peuvent dans certains endroits représenter environ 40% du calcaire des récifs.. Souvent nous les prenons pour des morceaux de corail mort mais c’est bien vivant et surtout très important pour l’écosystème corallien. »

Retour aux sources et spécialisation

Ces nombreux voyages ont maintenu Vaihiti dans sa vocation et il est temps de rentrer à la maison. Revenue à Tahiti, elle accepte un deuxième contrat post-doctorat afin de poursuivre ses travaux sur les huîtres perlières et leur réaction face au changement climatique, ce qui la mènera à accepter un poste de chercheuse titulaire à l’Ifremer. 

« Mes spécialités sont la génomique4 et l’écophysiologie. Mes recherches utilisent la molécule d’ADN pour étudier les réponses génétique et physiologiques des organismes marins dans leur environnement et qui subissent de plus en plus de pressions anthropiques. Depuis peu, je m’intéresse aux bénitiers qui tout comme les coraux, vivent en symbiose avec les zooxanthelles6. Ces dernières micro-alques fournissent au bénitier 90% de ses besoins énergétiques. »

Grâce à ses spécialisations, Vaihiti œuvre à comprendre le rôle des zooxanthelles dans la tolérance thermique et la physiologique du bénitier, comme par exemple dans sa reproduction. 

La préservation de l’environnement au coeur de son engagement

À son retour au Fenua, la jeune chercheuse ne s’est pas contentée des murs et des fioles des laboratoires. 

« Avant d’être titularisée j’ai travaillé auprès de l’association SOP Manu7 qui travaille à la conservation et restauration de l’avifaune de Polynésie française. J’ai participé à la restauration des vallées à Monarques avec la mise en place de pépinières de plantes indigènes , je suis également intervenue auprès d’écoles et j’ai emmené les enfants en mission avec moi. »

Une expérience qui s’est avérée fondatrice. 

« Je n’ai pas travaillé longtemps avec la SOP Manu mais c’était très enrichissant et ça a renforcé ma volonté d’œuvrer pour la protection de notre environnement.. Je me sentais être au cœur de l’action, je me sentais utile pour mon Fenua. J’ai pris conscience de la richesse de nos îles mais également de leur fragilité. »

Transmettre pour protéger

Au-delà de toutes ses capacités, Vaihiti intervient également dans l’enseignement, que ce soit à l’UPF pour les Master2 EIO ou chez les plus jeunes dans nos îles lors de mission de terrain ou encore prochainement lors d’un projet d’aire marine éducative8 à Toahotu. 

« J’ai à coeur la transmission. J’aime beaucoup le concept du savoir pour tous et j’essaie d’y être impliquée. »

De la primaire aux études supérieures, Vaihiti a de nombreux arcs à apporter aux élèves de nos îles : sa motivation, son professionnalisme et son amour pour la nature. 

  1. IFREMER : Institut Français de Recherches pour l’Exploitation de la Mer 
  2. post-doc : contrat post doctoral permettant de recruter de jeunes chercheurs dans le cadre d’un projet retenu au titre d’un appel à projet. 
  3. algue rouge calcaire : aussi appelées corallinales, elles apportent la matière calcaire première et structurent l’ensemble du récif. 
  4. génomique : branche de la génétique qui concerne le génome d’un organisme, c’est-à-dire le déchiffrage de son ADN et la compréhension de son fonctionnement. 
  5. écophysiologie : discipline de la biologie qui étudie les réponses comportementales et physiologiques des organismes à leur environnement. 
  6. zooxanthelles : algue qui se développe en absorbant le dioxyde de carbone libéré par son hôte (corail, bénitier et autres animaux marins) et lui fournit en retour divers nutriments. 
  7. SOP Manu : La Société d’Ornithologie de Polynésie “Manu” œuvre pour la protection des oiseaux sauvages de Tahiti et ses îles ainsi que pour la préservation de leurs habitats.
  8. aire marine éducative : espaces délimités en mer qui répondent à des objectifs de protection de la biodiversité marine et favorise la gestion durable des activités marines. Ces espaces deviennent le support de projets pédagogiques de connaissances et de préservation de l’environnement pour des élèves de l’élémentaire au lycée. 

Lucie Chauvin (Cartouche)

Rédactrice

©Photos : Niuhiti Gerbier et Vaihiti Teaniniuraitemoana pour Femmes de Polynésie

Directeur des Publications : Yvon BARDES

Pour plus de renseignements

Portrait mis en avant par l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer à l’occasion de la célébration des 40 ans de l’Institut.

Site internet

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