
Mahe Tchang, transmettre le mindset du sport
Femmes de Polynésie part à l’entraînement dans la box de CrossFit et Fitness de Mahina, pour rencontrer Mahe Tchang, coach sportive et gérante de la salle. Elle nous partage une leçon de discipline apprise grâce au sport : nous sommes capables de nous dépasser chaque jour pour devenir meilleur·e·s.
Une vie dédiée au sport et au partage
Mahe Tchang est une femme de Mahina : c’est là qu’elle a grandi et qu’elle a décidé de s’investir professionnellement. Elle y a ouvert une école de conduite en 2015, puis une box de CrossFit et fitness en 2019.
« J’ai toujours fait du sport. Mon père était entraîneur de rame et ma mère aimait la danse. Moi, je voulais faire du foot, donc j’ai fait les trois pendant des années, sans que mes parents sachent que je faisais du foot au club de la Pointe Vénus. »
En 2011, elle part se former en France et revient l’année suivante exercer comme monitrice d’auto-école. En parallèle, elle s’investit dans l’haltérophilie, discipline dans laquelle elle progresse rapidement.

Un tournant personnel
En 2016, Mahe traverse une période très difficile : elle perd sa maman.
« J’étais au plus bas. Mais c’est le sport qui m’a remise debout. J’avais tout perdu, alors je me suis dit : vas-y, fonce. »
Cette épreuve renforce son envie de se lancer pleinement dans une carrière sportive.
Le déclic
Elle devient championne de Polynésie d’haltérophilie en 2015, puis représente le pays en 2017 aux Jeux d’Asie [1]:
« Là-bas, j’ai vu ce que c’était, le haut niveau. J’ai compris qu’on n’était pas assez accompagnés ici. J’ai dû me préparer seule. Heureusement, entre athlètes, on s’entraidait beaucoup dans mon ancien club, Nahiti no Arue – une vraie famille de sport que je n’oublierai jamais. »
La naissance de Feti’a Nui no Mahina
« J’ai sauté sur l’occasion. Je n’étais pas prioritaire parce que j’avais déjà l’auto-école. Alors je suis allée tous les jours demander ma place. J’ai tellement insisté que la dame m’a laissé lui présenter mon projet de salle à Mahina. Finalement, elle a pris mon dossier ! »
Elle passe les tests, est retenue, et se forme jusqu’en 2018. Mahe ouvre ensuite, en octobre 2019, la première salle de sport à Mahina : The Fitness Box Mahina, qui est devenue aujourd’hui Feti’a Nui no Mahina.

« Depuis que j’ai ouvert la salle, je me suis dévouée à mes athlètes. De temps en temps, j’allais porter la pierre (jeux traditionnels), faire des petites compètes pour rester en forme. Aujourd’hui je ne pratique plus trop pour la compétition. J’aime surtout transmettre. »
Le bon mindset par le sport
Coach, cheffe d’entreprise, athlète… Mahe transmet aujourd’hui la discipline que lui a inculqué le sport.
« À la base, je faisais que de la muscu. Et puis j’ai découvert le CrossFit : il y a tellement de choses à améliorer, ça change tout le temps ! À chaque fois, ça m’a développé d’autres qualités physiques. Je n’aime pas avoir de points faibles, alors j’ai travaillé mon cardio, mon souffle… J’ai pratiqué tout ce que le CrossFit avait à offrir. »
Le corps entraîne l’esprit, et vice versa :
« Je coach mes athlètes en CrossFit parce que ça m’a sauvé la vie. Avec ce sport, on apprend à se dépasser, à aller plus loin, même quand c’est dur. »

Enfin, ce qui compte dans ce mindset, c’est surtout le partage. Mahe préfère le dépassement de soi, le partage, à la compétition.
« J’aime bien la compète, ça donne des challenges. Mais il faut savoir doser, ne pas l’imposer dans ta vie au quotidien. Moi, je suis pour le sport plaisir. Il faut simplement chercher à être meilleur que soi-même. »
Discipline, famille et transmission
« Beaucoup de gens arrivent à la salle avec une hygiène de vie compliquée. Mais en accrochant au CrossFit, ils veulent progresser, alors ils commencent à changer : ils prennent soin d’eux. »
À Feti’a Nui no Mahina, les progrès se vivent en famille :
« Au début, je pensais attirer surtout les jeunes, mais j’ai eu beaucoup de femmes. Alors je me suis dit : si je prends soin d’elles, elles vont changer leur quotidien. Et elles sont revenues avec leur mari, leurs enfants… »

Intervenir auprès des jeunes
« Je voulais à tout prix travailler avec les jeunes. Plus tu les formes tôt, mieux tu transmets. C’est l’avenir. »
Son objectif : leur transmettre confiance, goût de l’effort et responsabilités.
« Mon premier vrai projet, c’était de changer le mindset des jeunes, pour qu’ils prennent soin d’eux, qu’ils comprennent que la progression passe par la discipline. »
Et demain ?
« À 35 ans, j’ai encore envie de me réorienter. On ne vit pas qu’une fois, on vit tous les jours ! Je pense qu’on doit passer plusieurs étapes avant de vraiment trouver le métier qui nous correspond. Et là, je me lance. Je me donne deux ans. C’est ça, la discipline. »

[1] Les Jeux asiatiques, ou Jeux panasiatiques ou Jeux d’Asie, sont une compétition multisports organisée par le Conseil olympique d’Asie. Cette compétition a lieu tous les quatre ans et réunit les sportifs de l’Asie. En 2017, les Jeux se déroulent à Achgabat, au Turkménistan.
[2] Brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport. Ce diplôme atteste de la possession des compétences professionnelles indispensables à l’exercice du métier d’animateur, de moniteur, d’éducateur sportif.
[3] L’institut de la jeunesse et des sport de la Polynésie française

Rédactrice
©Photos : Wod Island pour Femmes de Polynésie
Directeur des Publications : Yvon BARDES



