
Hinatea Chatal, de Radio 1 Papeete à Cnews Paris
Dans la liste des enfants du fenua travaillant au national, nous avons Hinatea Chatal ! L’ex animatrice du Radio Show sur Radio 1 en a parcouru du chemin. Après son duo avec le regretté Mario sur la 1ère, elle est devenue : animatrice à Tropiques FM, chroniqueuse People, s’engage pour l’humanitaire à Non Stop People et est même présentatrice journaliste météo sur Cnews… à Paris. Malgré un emploi du temps très chargé, Hinatea a pris le temps de nous rencontrer.
« Je m’appelle Hinatea Chatal, j’ai 27 ans. Animatrice radio et présentatrice TV, 1m65 de bonne humeur, folle amoureuse de mon homme et fille unique à son papa et à sa maman. »

En télévision, il y a ce que l’on appelle des « visages » ! Hinatea Chatal en est un. Pas encore la trentaine que déjà sa frimousse s’invite dans l’Hexagone par le biais de la petite lucarne. Une carrière débutée très tôt. Pour en connaître la genèse, il faut remonter à son statut d’étudiante. Alors qu’elle est en 3e année de licence en communication à l’ISSEP, elle marque Frédéric Dubuis, ex-directeur des antennes à Radio 1 et professeur de radio.
«Il m’a embauché pour devenir animatrice en 2013. Parallèlement à mon master que je faisais en cours du soir, je travaillais le matin en radio à Radio 1 où j’animais le Radio Show, depuis repris par Alexandre Taliercio. »
La télé ? Hinatea y fera ses premiers pas en animant la saison 2014/2015 de Tahitian Voice. Une prestation remarquée par le directeur des Antennes de Polynésie la Première, Jean-Philippe Lemée. Elle coanimera aussi Fare Ma’ohi aux côtés du regretté Mario.

« J‘ai extrêmement mal vécu son décès, car j’étais seule en France quand c’est arrivé. Ce sont mes parents qui sont allés lui rendre hommage pour moi. Maman a chanté en tahitien et fait une prière. »
UNE ENFANCE BERCÉE PAR GABILOU ET LES TE AVA PITI
Sa mère, Teretia Paeamara est de Rikitea au Gambier et son père, Dominique, est breton. Hinatea voit le jour et grandi jusqu’à l’âge de 14 ans dans les campagnes de la Beauce, près de Chartres.
«La Beauce, ce plat pays entouré de champs… je l’aime tout autant que nos lagons… Avec ma maman, on prenait souvent la voiture pour aller faire du shopping en région parisienne, les mercredis après l’école, quand j’avais 13/14 ans. Maman me faisait écouter Gabilou et Te Ava Piti . Le fenua lui manquait, et on chantait à tue-tête comme si on étaient seules au monde. »

Quand l’heure de la retraite sonne pour son père, en 2006, ils plient bagages et partent vivre à Taravao. Hinatea entre alors au lycée de Taiarapu Nui.
« Difficile de quitter mes copines de France, mais maman retrouvait sa famille, notamment ses 13 frères et sœurs et son papa. »
Ses parents lui ont appris tellement de choses : en premier lieu, l’importance de l’amour. Trente trois ans qu’ils sont ensemble et ils s’aiment comme au premier jour ! Hinatea se plaît à dire avec humour :
« Ils “puent” l’amour ! Ils ne se quittent quasiment jamais, ils ne font rien l’un sans l’autre… Un véritable conte de fées dont on peut rêver. Ce sont des âmes-sœurs… Je suis persuadée que même la mort ne les séparera pas, ils se retrouveront toujours. Et je suis fière d’avoir eu cet exemple à la maison. C’est eux qui m’ont inculqué la gentillesse, l’altruisme, la générosité, la bienveillance et tellement d’autre choses… »
DE L’ANIMATION LOCALE À NATIONALE
Parmi ces « autres choses », il y les fruits exotiques, comme les « mangue/ananas bonbon chinois, je donnerai n’importe quoi pour en manger ! ». Elle pratique aussi plusieurs styles de danse, cela va du classique au modern’Jazz en passant par la salsa, la bachata et évidement le ‘ori tahiti.

« Je joue de la guitare classique depuis que j’ai 13 ans et je chante depuis toute petite en français, anglais, espagnol et tahitien. Sinon, je ne suis pas une experte en art martial mais je pratique la boxe thaïe depuis quelques mois. Mes parents et moi adorons les animaux, ils ont 5 chiens, 12 chats, des poules sauvages et des poissons. Nous faisons partis de la SPAP depuis 2011. »

Professionnellement, elle a découvre à Radio 1, son premier vrai poste, que le travail, c’est aussi des collègues merveilleux, des gens sur qui on peut compter, avec des bons moments et des coups de gueule, mais jamais de méchanceté.
« L’ambiance à Radio 1 était géniale ! J’en garderai toujours un super bon souvenir. »

D’ailleurs, trois de ses meilleurs amis ont été journalistes à Radio 1 : Samia, Roxane et Damien. C’est eux qui la soutienne quand elle arrive à Paris et qui lui apprennent tout du PAF et de la vie parisienne.
« Eux-mêmes Parisiens ayant vécu à Tahiti, ils savaient que le choc culturel allait être difficile. Même si je suis née et ai grandi en France, j’ai passé ma vie de jeune adulte à Tahiti et surtout, je viens de Province. La mentalité parisienne est très différente de ce que je connaissais de la France. »
Après un an à la chaîne Première, elle part vivre trois mois en Australie, entre 2015 et 2016, pour perfectionner son anglais.
« C’etaient des compétences quasi indispensables dans mon métier, je suis déjà bilingue espagnol français. »
Puis en septembre 2016, à 24 ans, elle saute le pas et part seule en France avec deux valises : une de linge et une autre de chaussures.
HINATEA et ses 3 EMPLOIS
À Paris, elle découvre que l’ambiance y est très différente. Des filles belles et intelligentes, avec des contacts et qui veulent faire de la télévision, il y en a à la pelle ! Elle réalise qu’il faut savoir se démarquer, tout en gardant ses valeurs et ne pas se laisser abattre par les échecs, car ils sont nombreux avant d’atteindre ses objectifs. Pour garder la tête froide, elle sait pouvoir compter sur ses amies d’enfance et sur ses copains journalistes, une véritable deuxième famille.
« Mes amies d’enfance forment mon noyau dur. J’ai une confiance aveugle en elles. Elles ont toujours été là, même dans les moments les plus difficiles. Mes amies de Tahiti me manquent énormément aussi. On s’écrit toujours pour avoir des nouvelles et heureusement qu’il existe Internet. »
Elle commence au RSA, galère dans des petits boulots à Paris alors qu’elle ne sait même pas prendre le métro, qu’elle a froid par… 23 degrés ! Mais à force d’acharnement, de castings, de recherches, elle finit par trouver et se forme pour présenter la météo à La Chaîne Météo.
« Après un an chez eux, j’ai rompu mon CDI pour poursuivre ma carrière et multiplier les activités. »
Hinatea Chatal cumule ensuite trois jobs : le premier, animatrice radio à Tropiques FM (radio parisienne qui représente les Outre-Mer).
« Et j’y suis la seule Polynésienne ! Ravie de représenter mon fenua à Paris, et aussi de faire découvrir des musiques. Des artistes comme notre ami Gabilou et sa fille Hianau sont venus nous voir. »

Le second : elle est chroniqueuse People Engagement Humanitaire à Non Stop People ( la chaîne câblée de JM Morandini).
« Comme je fais beaucoup de bénévolat, mes rédacteurs en chef ont estimé que j’étais celle qui incarnait le mieux la chronique humanitaire. »
Enfin, troisième job et pas des moindres, Hinatea est présentatrice-journaliste Météo sur Cnews.
« En plus de réveiller les gens en les mettant de bonne humeur, je fais un travail de pur journaliste, recherche d’infos de façon à informer les gens rapidement en répondant à leurs questions. »
LA TÉLÉ, UN métier pas facile
Chaque situation est différente, il faut s’adapter et vite ! Avec des grosses journées et des semaines parfois longues, Hinatea aime à dire que lorsqu’on aime, on ne compte pas. Autre constat, en France, les femmes de la télé sont très sexualisées. Hinatea pourrait annoncer qu’il va faire 30 degrés en décembre, ce n’est de sa tenue ou de son décolleté qu’on lui parlera ! Sur ce sujet, elle nous confie :
« C’est très dégradant. J’ai récemment dénoncé cette situation sur les réseaux sociaux. Je ne souhaite pas m’apitoyer sur mon sort. Au contraire, je veux dénoncer les violences sexistes des filles de la télé et leur sexualisation des femmes, pour montrer l’envers du décor du métier et ses mauvais côtés. Beaucoup pense qu’on fait ce métier pour être riche et célèbre, mais ça n’a rien à voir : on n’est ni riche ni célèbre ! »

Voici donc pour Hinatea les qualités à avoir pour exercer ce métier :
« Ne pas avoir peur de la critique et du regard des autres, sinon ça devient vite compliqué et on est dépassé par la méchanceté gratuite. Être à l’aise face à la caméra ou au micro. Il faut être naturelle et aimer animer, faire rire, présenter et informer. Se cultiver pour savoir de quoi on parle, et toujours apporter une plus-value à son discours, s’intéresser à l’actualité et savoir travailler en équipe. On bosse avec une rédaction, parfois dans le stress du direct, ça crie ! Il faut avoir les épaules pour supporter la pression des grands médias. Animer une émission d’une heure équivaut à animer une réunion importante face à un gros client. Le stress est à son max ! Quand on en sort, on est totalement vidé. Et ça recommence tous les jours… »
L’INFLUENCE DES MÉDIAS SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX
Les supports de communication se sont multipliés en moins de deux décennies, comment réussir à conjuguer les outils d’aujourd’hui aux méthodes d’hier ? À cette question, Hinatea concède que la télévision est très présente sur les réseaux, on peut revoir les émissions en replay ou même en direct. Les réseaux comme Twitter permettent les réactions en direct et un retour concret des téléspectateurs.
« Internet est devenu un média qu’il faut manier avec précaution. Quand on fait de la télé, notre présence est quasiment nécessaire sur les réseaux. Avant à Tahiti, je n’avais pas de page fan Facebook. Je n’en voyais pas l’intérêt. Et en m’installant à Paris, mes copines journalistes m’ont dit que c’était indispensable d’avoir une présence sur les réseaux sociaux pour se faire repérer. J’ai ma bande démo sur YouTube, dans laquelle je montre les coulisses de tournage en story. Je poste aussi régulièrement sur Fb pour informer de mon programme. »

HINATEA, UN VISAGE D'OUTRE-MER ENGAGÉ
L’influence des médias est un fait et il y a des sujets pour lesquels Hinatea Chatal prête son image, comme l’association du Forum Météo Climat, à laquelle elle appartient comme tous les présentateurs météos.
« Nous luttons tous ensemble pour le climat et la préservation de l’environnement, en se rassemblant et en organisant des opérations de sensibilisation à l’attention du grand public, comme des conférences sur la météo et le climat. Sinon, je prête volontiers mon image à tout ce qui représente le fenua. J’en suis extrêmement fière. »

« Les gens ne peuvent pas tout connaître, j’essaye donc d’inculquer les valeurs que nous avons en Polynésie. Par exemple : à Paris, on se plaint pour 3 gouttes de pluie. Du coup, je poste les vidéos de Tahiti avec des gens qui font du paddle sur les routes inondées. Encore un choc culturel. On ne se plaint pas chez nous, on vit avec les aléas de la nature… »
Hinatea a toujours été très ambitieuse… Mais avec le temps, l’âge et l’expérience, elle se rend compte qu’elle aime ce qu’elle fait maintenant. Elle admet apprécier sa vie telle qu’elle est à l’heure d’aujourd’hui. Mais si elle devait rajouter quelque chose, ce serait principalement de présenter une émission de divertissement (DALS, Incroyable Talent), car ce sont les émissions qu’elle préfère :
« Surtout, j’ai une grosse préférence pour le direct antenne. L’adrénaline que cela procure est juste géniale ! Cinq minutes avant l’antenne, je me demande pourquoi je fais ce métier tellement je stresse, et à la fin, je me dis toujours : “J’adore mon métier !” »
À celles qu’elle aurait pu inspirer localement, les perspectives disponibles dans son secteur d’activité sont nombreuses. Elle affirme qu’il y a du travail pour les plus motivées, et il ne faut pas avoir peur de se lancer.
« J’ai passé des heures devant mon ordi à faire des jeux pour enfants pour apprendre la géographie parfaitement. Il faut lire, adhérer des associations et rencontrer des professionnels. Il ne faut jamais avoir peur de réaliser ses rêves, il faut se libérer de ses peurs et se donner les moyens de réussir, car ça ne viendra jamais des autres. »
HINATEA, UNE VAHINE INDEPENDANTE
L’entrepreunariat au féminin n’est pas un vain mot pour Hinatea. Bien sûre, elle a eu des modèles, des références qui l’ont confortée dans son choix de vie, à commencer par ses parents. Sa mère a arrêté l’école très jeune et, même mariée à son père, a toujours tenu à être indépendante.
« Ils m’ont toujours appris que je ne devais jamais dépendre de personnes dans la vie et ce dans n’importe quel domaine : financier ou affectif. Ma mère a travaillé 15 ans en usine en 3/8, à se lever à 5h du matin, et je suis fière de l’exemple qu’elle m’a montré toute mon enfance. Mon papa m’a toujours appris le goût de la lecture et de la musique, et que le plus important, c’était de bien travailler à l’école pour réussir plus tard. Ils se sont sacrifiés financièrement pour me payer mes études. Sans eux, je ne serai pas là où j’en suis… Ils m’ont toujours soutenue dans tout ce que je fais. Et j’espère aujourd’hui que je les rends fiers… »

À ses yeux, les Polynésiennes sont des femmes fortes et de caractère, des qualités nécessaires pour diriger une entreprise. Mais Hinatea pense qu’il y a encore beaucoup trop d’entre elles qui ont peur de se lancer, par manque de confiance en elles. Il faut savoir trouver les ressources en soi et autour de soi pour se lancer. S’il y a des secteurs d’activité qui mériteraient d’être soutenus, elle répond sans hésitation :
« La culture et le tourisme ! On est fiers de notre culture et il faut la préserver à travers notre langue, nos danses, nos costumes traditionnels, tout en se modernisant afin d’exporter la Polynésie à l’étranger. Développons le tourisme grâce aux réseaux sociaux. »
Toujours selon les retours qu’elle obtient de ses posts, les gens veulent s’évader dans nos îles à travers leur écran. Elle encourage donc les influenceuses comme BeautyVahine ou encore son amie Maheata qui font des directs et des vidéos sur les réseaux sociaux.
« C’est ce que tout le monde fait en France, et nous sommes un peu en retard là-dessus, en Polynésie… J’encourage les jeunes qui aiment les réseaux sociaux à garder cette passion et à la transformer en métier. »

Un projet, plus intime celui-là, lui taraude l’esprit : montrer sa culture à l’homme qui partage sa vie. Sébastien est ingénieur automobile, il ne connaît pas du tout la Polynésie.
« J’ai hâte de lui faire découvrir nos îles et notre culture ! J’ai de la chance de l’avoir lui et ma belle-famille, ils sont merveilleux. Nous défendons les mêmes valeurs. Il est d’un soutien sans faille. »
Pour achever cet entretien, Hinatea adresse quelques mots à nos fidèles lecteurs :
« Si tu n’es pas heureuse, change ce qui ne va pas. Démissionne. Déménage. Quitte cette relation qui te rend malheureuse. Arrête de trouver des excuses. Toi seule peut diriger ta vie. C’est ce que j’ai fait. Je n’ai jamais été aussi heureuse que maintenant ! »

Jeanne Phanariotis
Rédactrice web
©Photos : Images Facebook Hinatea Chatal, Cédric Valax pour Femmes de Polynésie
Directeur des Publications : Yvon BARDES



