Van-Mai, chercheuse et docteur en sciences
Pour célébrer la journée internationale des Femmes, le 8 mars 2018 prochain, l’Association UFFO (Union des Femmes Francophones d’Océanie) a décidé à mettre en lumière 8 Femmes polynésiennes qui se distinguent dans différents domaines d’activités. Ces femmes remarquables par leur personnalité et leur force d’engagement, ce sont nos POERAVA, ou perles précieuses. Pour l’occasion, Femmes de Polynésie s’associe à cet événement qui les met en valeur.
Après avoir obtenu en 2006 un doctorat en Sciences à l’UPF, Mai Cao-Lormeau entre à l’Institut Louis Malardé (ILM) où elle dirige le laboratoire de recherche en virologie médicale. Elle a conçu, réalisé, coordonné de nombreux programmes d’études centrées sur les maladies transmises par les moustiques : d’abord la dengue, puis d’autres arboviroses comme le Zika ou le Chikungunya.Ses travaux sur le Zika
C’est à l’occasion de la grande épidémie de Zika en 2013-2014 en Polynésie française que s’est affirmée la reconnaissance scientifique internationale des travaux coordonnés par Mai Cao-Lormeau, et que le grand public a découvert la qualité des travaux accomplis. En 2013, alors qu’il n’y avait eu qu’une épidémie connue du Zika dans l’île de Yap en Micronésie, le laboratoire de l’ILM avait déjà anticipé les risques d’arrivée de telles épidémies en mettant en place les outils scientifiques permettant de confirmer rapidement la circulation du virus, ainsi qu’une étude de séroprévalence pour connaître l’état immunitaire des Polynésiens vis-à-vis du Zika et d’autres virus à risque épidémique. Ces travaux ont ainsi permis une réaction rapide des autorités de santé pour faire face à l’épidémie fulgurante. Mai a également publié, en partenariat avec ses collaborateurs et son équipe le premier article sur le syndrome de Guillain-Barré, comme complication grave du Zika (42 cas ont été traités au CHPf).Une recherche ouverte sur la Région océanienne
Mai Cao-Lormeau a choisi la voie ardue d’être chercheuse en Polynésie française sur des problématiques qui intéressent la santé des Polynésiens, malgré des sollicitations pour exercer ailleurs ; faire quelque chose d’utile pour le pays passe aussi par l’encadrement d’étudiants polynésiens ou étrangers. Depuis 2017 elle a obtenu l’Habilitation à Diriger des Recherches (HDR). Elle insiste sur le partenariat développé avec les pays insulaires océaniens, placés devant les mêmes risques de santé publique, mais n’ayant pas toujours les moyens scientifiques polynésiens.Pour Mai « la santé est un moyen positif de s’ouvrir à la région, de se rapprocher, de faire rayonner la Polynésie dans le Pacifique. »
Très tôt elle accepte le défi d’assurer la direction de l’unité de virologie médicale parce que les anciens étaient partis. La qualité des travaux et des programmes qu’elle coordonne lui a permis d’obtenir les financements nécessaires pour ses projets de recherche. Mais trouver de l’argent pour faire avancer la recherche (même en santé publique) reste un défi permanent.Être une jeune femme dans un monde plutôt masculin
Ses 11 ans de travaux et de carrière ne se sont pas déroulés sans difficultés : il lui a fallu dit-elle de la détermination, de la passion et… de la patience.« Se battre pour défendre certains choix de recherche. »
La crédibilité scientifique a été plus longue à obtenir en interne qu’à l’extérieur. « Nul n’est prophète en son pays ». Le milieu scientifique de la santé, français et polynésien, est plutôt un monde d’hommes, en particulier lorsqu’il s’agit de postes à responsabilité : être jeune et être une femme n’a pas vraiment facilité les choses. « Mais cela change. » dit-elle ! Les problèmes rencontrés l’ont rendue plus forte et elle a pu compter sur sa famille pour lui apporter la sécurité et la sérénité nécessaires, mais aussi sur des collègues chercheurs et l’équipe autour d’elle.Selon Mai Cao-Lormeau « On réussit ce pour quoi on est passionné. Il faut savoir saisir les opportunités et accepter de surmonter les difficultés ».
Dans le monde de la recherche, comme dans la vie de tous les jours, les femmes ont généralement plus conscience que leurs choix vont avoir un impact sur la vie courante de l’équipe, de la communauté et de la collectivité. Par son engagement et sa détermination Mai est bien une perle rare ! Armelle Merceron Rédactrice web © Photos : Mai Cao-Lormeau, www.la1ere.francetvinfo.fr, www.cdc.gov