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    Portrait

    Taloo, chanteuse inspirante et musicienne de talent

    Publié le 7 mars 2018

    Elle a un timbre de voix particulier, calme et posé : Taloo Saint-Val est chanteuse ici, en Polynésie. Lorsque je lui demande de me raconter sa vie, elle me prévient : « Je ne raconte pas les choses dans l’ordre, le passé est passé, donc c’est un peu flou pour moi. » Taloo est de ces personnes qui préfèrent regarder vers l’avant, vers l’avenir. Une philosophie de vie qui l’accompagne au quotidien, dans son métier de chanteuse et dans son école, où elle transmet les bonnes pratiques de la voix. Femmes de Polynésie vous emmène à sa rencontre.

    Enfance et influences musicales

    Avec une famille qui aime la musique, Taloo écoute dès son plus jeune âge des styles très variés, chacun ayant ses propres goûts musicaux. Elle se rappelle certains de ces oncles et tantes, qui faisaient partie de groupes du folklore polynésien, ou encore de sa grand-mère…

    « J’ai une grand-mère qui chantait très faux mais qui adorait chanter et c’était très drôle. »

    La musique fait tellement partie de sa vie qu’elle ne se souvient pas lorsqu’elle a commencé à chanter. Née en France d’une famille polynésienne, elle y passe les dix premières années de sa vie. Là-bas, la bringue polynésienne berce ses souvenirs car « c’est comme ça qu’on fait la fête ici ».

    « Et la bringue c’est pas juste écouter de la musique, c’est aussi la faire. »

    À dix ans, elle arrive en Polynésie pour ne plus la quitter, et elle grandit à Tahiti. Taloo avoue avoir chanté « en fraude » alors qu’elle était mineure, avec les orchestres d’une petit boîte appelée New Orleans.

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    « J’ai pas beaucoup chanté avec eux mais j’ai des bons souvenirs. »

    Les premiers karaokés apparaissent à Tahiti lorsque Taloo a 17 ou 18 ans. Elle chante dans un bar avec des amis, « c’était le Salvany’s à l’époque ». Par la suite, Maeva Cavallo fait appel à elle pour chanter en tant que choriste avec un guitariste et chanteur américain qui s’était installé à Tahiti.

    « C’est la première fois que j’étais payée pour chanter et je trouvais ça très étrange de toucher de l’argent pour ça. J’avais 18 ans et j’étais enceinte jusqu’aux dents. »

    Un parcours de vie placé sous le signe de la musique

    Lorsque sa fille voit le jour, Taloo doit subvenir à ses besoins. Pour elle, la musique est un métier comme un autre, mais « pour la société en général, il fallait un vrai travail et pour beaucoup de gens, la musique n’est pas un vrai travail ». Elle entame donc une formation de trois ans à l’École Normale pour devenir institutrice et fait des petits boulots en parallèle. Mais rapidement, elle se rend compte que cette vie n’est pas faite pour elle.

    « J’aime bien transmettre mais pas avec les règles des autres. »

    Une amie l’emmène alors dans un petit night-club, le Grenier de Montmartre, où elle commence par chanter une première chanson avec les musiciens. Convaincante, elle finit par chanter avec eux toute la soirée. Taloo vient de quitter l’École Normale et ne sait pas encore ce qu’elle va faire mais la solution vient à elle lorsque la patronne du Grenier de Montmartre lui propose un poste de chanteuse avec un statut de salariée.
    Pour Taloo, cette période est très formatrice. Chanson française, jazz, rock, chansons locales… Elle chante cinq soirs par semaine et sa voix prend de l’ampleur, « ça muscle les cordes vocales ». Elle commence aussi à se balader avec son micro et chaque fois qu’elle rencontre un orchestre, elle leur demande de chanter avec eux.

    « Je me suis bien amusée à cette époque, ça a duré quatre ou cinq ans. »


    Ensuite, Taloo donne naissance à un petit garçon. Elle décide d’arrêter de travailler au Grenier de Montmartre lorsque ses enfants l’y accompagnent un jour qu’elle passe récupérer des affaires.

    « Ça puait le cendrier froid et ils m’ont dit « on dirait toi » ! Hyper agréable surtout que je ne fume pas. Je me suis dit que c’était plus ce que j’avais envie de faire sur le moment. »

    Taloo m’explique qu’elle fait beaucoup les choses sur un coup de tête, elle n’a pas peur de la suite « parce que les étoiles s’alignent toujours pour que ça se passe bien ». Par la suite, elle joue dans différentes formations, est chanteuse dans plein de groupes, sans statut de salariée.

    « Ce qui est plutôt bien, c’est un métier libre du coup. Je suis allée jusqu’à six groupes en même temps et je remplissais mes semaines. »

    La chanteuse a ensuite envie d’explorer d’autres facettes de sa créativité et commence une formation de trois ans au Centre des métiers d’art. En deuxième année, elle choisit de se spécialiser dans la sculpture et se « réveille un peu », comme elle aime le dire, à la culture polynésienne.

    « Je l’ai fait mais avec la musique en filigrane parce que j’ai jamais vraiment arrêté. »

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    En 2017, Taloo a aussi été jury de sélection et coach pour Nescafé Star1. Une belle aventure et un challenge pour elle qui aime travailler dans l’urgence.

    « C’est une autre façon d’enseigner parce qu’ils doivent faire un morceau le mieux possible pour telle date, c’est travailler de façon spécifique avec un objectif. »

    Trouver sa voie grâce à la voix

    Il y a un an et demi, Taloo ouvre une école de musique avec son ex-compagnon. Tout commence lorsque des amies lui demandent des cours de chant, mais elle ne se sent pas capable de transmettre sa passion, sans bagage technique puisqu’elle n’a jamais suivi de formation.

    « Ce qui m’a donné envie de le faire, c’est l’une de mes amies qui m’a dit qu’elle cherchait sa voie. Et je lui ai demandé V-O-I-X ou V-O-I-E ? Elle ne savait pas répondre… »

    Taloo m’explique que les enfants et les ados ont envie de chanter pour s’amuser mais pour beaucoup d’adultes, le chant leur permet d’apprendre qui ils sont et donc, de trouver plus facilement leur voie.

    « Ça fait tellement partie de l’identité, la voix… »


    Dans son école, Taloo donne du conseil pour la voix : elle enseigne bien sûr le chant, et peut aussi recevoir des personnes qui vont passer un entretien d’embauche et ont besoin « d’avoir l’air sûres d’elles », ou encore préparer des élèves à leur oral de Bac. Mato, lui, enseigne la guitare, la basse et le ukulélé.
    Au-delà de l’école, tous deux forment aussi le groupe Taloo et Mato, qui diffuse sa musique pop acoustique, à Tahiti et sur d’autres îles de Polynésie.

    « On a aussi un groupe avec lequel on se produit moins en ce moment qui s’appelle Taloo’n’Co avec lequel on fait du smooth jazz et du funk lounge. C’est notre propre style de musique. »

    Taloo joue aussi de la basse dans d’autres groupes, où elle ne chante pas. Les musiciens se produisent peu, une fois par an, mais interprètent leurs compositions. Pour la musicienne, c’est agréable de jouer ses propres morceaux, de présenter ce qu’ils ont créé et de voir les réactions du public.

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    © g.pics

    Aujourd’hui, Taloo a trois enfants et pour elle, tout est allé très vite, comme une évidence. Elle ne trouve pas avoir eu le courage de mener une carrière de chanteuse et musicienne, alors que cette profession est peu reconnue. Elle l’a fait, « c’est tout ».

    « La première fois que j’ai eu un micro, après tout s’est enchaîné. Je ne me suis surtout pas posé de question. »

    Taloo est une artiste « touche à tout » pour qui apprendre est une véritable passion. Aujourd’hui, elle souhaite transmettre ce qu’elle sait.

    « Enseigner c’est apprendre, c’est ce qui me plaît dans le fait de coacher. »

    Plus d’informations

    Sur les pages Facebook Taloo et Mato et Taloo’n’Co
    1 Nescafé Star : émission de téléréalité diffusée sur TNTV et mettant en compétition des chanteurs amateurs, sélectionnés par un jury selon leurs performances vocales et scéniques.

    Camille Lagy
    Rédactrice web
    © Photos : Femmes de Polynésie, Taloo Saint-Val, www.ladepeche.pf, g.pics, les 3 Brasseurs

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