Nicole Clark : créatrice aventurière à la reconquête du fenua
Après plusieurs tours du monde et 20 ans de carrière entre Dubaï et le Liban, Nicole revient s’installer dans son fenua natal. Créatrice, femme d’affaires et aventurière née, elle partage avec Femmes de Polynésie son parcours digne d’un conte des mille et une nuits.
L’ouverture vers le monde.
Nicole naît à Taravao, et grandit à Papara, avec un père paumotu et une mère marquisienne – la diversité commence belle est bien à la maison !
“J’avais un grand père français coté mère, et grand père anglais coté père, d’où le nom de famille Clark ”
À 17 ans, la jeune femme s’envole pour une tournée mondiale avec les grands ballets de Tahiti. Avec Gilles Hollande, le chef de troupe, elle fera 2 fois le tour du monde.
“ Une expérience qui m’a ouvert les yeux sur le monde – un monde rempli d’opportunités. ”
Nicole décide de s’installer à Dubaï. Elle y fait des rencontres qui vont marquer sa vie d’aventurière.
“ Après 3 ans à Dubaï, je suis rentrée au pays. À ce moment-là j’ai eu mon fils. ”
Elle continue dans la diversité avec sa passion pour le sport, plus particulièrement la rame, du va’a au kayak, Te Aito1 9 fois, championne du monde, championne de France, Nicole se fait une place en tant que légende du sport. Cette passion elle la partage avec son fils, qui connaît aussi un certain succès dans cette discipline.
“ Avec la rame, j’ai beaucoup voyagé, j’ai gagné la Molokai Race avec une équipe hawaiienne, j’allais souvent à Vancouver car j’avais intégré une équipe locale. ”
Et l’appel du nouveau retentit.
Une femme d’affaires Tahitienne au Liban !
En 2001 Nicole quitte une fois de plus la Polynésie pour se lancer dans le business au Liban.
“ A l’époque il n’y avait personne qui représentait la perle au Liban. Je me suis donc lancée dans la perle, en tant que grossiste et distributrice, de Tripoli à Tyr. ”
Et ça fonctionne ! Elle fournit également Dubaï et le Qatar, travaille différentes perles, comme la filipino jaune, la japonaise rose et l’australienne blanche. Au Liban, la perle noire de Tahiti rencontre des problèmes de superstitions.
“ La perle noire n’est pas bien acceptée quand elle est offerte, ça rime avec malheur. ”
Après 2 ans en tant que grossiste, Nicole ouvre sa boutique à Beyrouth. Elle travaille pour la princesse Moza, femme de l’émir du Qatar et participe également à des expositions au Liban à Dubaï et Abou Dhabi, et se met à créer.
“ Avec mes créations, j’ai gagné un prix à Dubaï. ”
Pas facile, de se faire une place dans un pays étranger. Nicole se dévoile un tempérament de combattante aventurière.
“ Mon côté aventurière, femme d’affaire et créatrice étonnait beaucoup les Arabes, car chez eux la femme n’est pas souvent vue ainsi. Mais ce clivage culturel ne m’a jamais affectée. ”
La situation économique, sociale et politique s’envenime au Liban et dans les pays voisins – une situation qui sort du controle de notre créatrice made in fenua.
“ On a subi des bombardements, puis une guerre civile qui a fait chavirer la situation économique ”
Nicole revoit ses plans et prend une décision, à contre cœur.
“ J’aime beaucoup le Liban, c’est comme un deuxième chez moi, les Libanais ont vraiment un gros cœur, surtout dans les villages, mais la situations se détériorait. J’ai donc pris la décision de revenir dans mon vrai chez moi. ”
Retour aux sources, sécurité et sérénité.
“ Se sentir chez soi en sécurité, ça n’a pas de prix. La Polynésie est un Eden où on se sent bien. ”
De retour au fenua, Nicole commence à designer des pièces uniques, en utilisant notamment les Keshi de Tahiti2.
“ Le keshi est en voie de disparition, j’ai du mal à en trouver, mais c’est ça aussi la création. ”
De grosses pièces inspirées en partie du milieu arabe aisé, ou grandeur et luxuriance n’ont pas de limites. Nicole imagine, dessine, concrétise et décide de participer au Salon Made in Fenua.
“ Quand j’ai commencé à créer le collier qui a remporté le prix coup de cœur du jury, je suis partie du principe que je n’en avais jamais vu des comme ça. Alors j’ai voulu en faire un. ”
Nicole ne souhaite pas en rester là, elle travaille déjà sa prochaine pièce et, entre sa boutique en ligne et celle de Bora Bora, elle ne cesse de créer.
“ Tout les 2-3 mois je crée de nouveaux modèles, c’est ce qui me fait avancer. Créer des pièces uniques, ça n’a pas de prix. J’ai adoré ma première expérience Made in fenua, une super équipe, et espère le refaire l’année prochaine avec des nouveautés. ”
1 Course de pirogue individuelle aussi appelées « Va’a Hoe » (ou V1).
2 Perle de culture de Tahiti sans noyau, est une concrétion perlière sécrétée par un greffon.
Propos recueillis par Lubomira Ratzova.
Niuhiti Gerbier
Rédacteur Web
©Photos : Lubomira Ratzova, Niuhiti Gerbier et Poe Tahiti pour Femmes de Polynésie