Kahaia Howard, un univers polynésien enchanté
Dans son jardin, au milieu des potirons, des piments et des hibiscus, Kahaia Howard a installé son atelier de bijoutière. Cette créatrice a accepté de recevoir Femmes de Polynésie au cœur de son univers enchanté pour raconter ses histoires de voyages, son goût pour la création de bijoux et l’amour pour les produits bruts locaux.
Faire des bijoux et voyager
« Je viens d’une famille d’artistes ; mon père, originaire de Hawaï, était sculpteur sur bois, il a commencé à créer des bijoux en perle et, avec ma mère, ils géraient leur ferme perlière à Moorea. C’est lui qui a le côté artiste, le côté manuel. Je l’ai vu manipuler la perle, la nacre pour faire des bijoux.
Ça a commencé comme ça.»
Pour ses études, Kahaia Howard s’oriente vers le marketting et le design dans l’optique de pouvoir un jour vendre ses créations. Revenue au fenua avec ses diplômes, la jeune femme travaille d’abord à la chambre de commerce de Papeete, mais ce mode de vie ne lui convient pas.
Elle se lance alors dans la création de bijoux à partir des produits de ses parents. Ils la soutiennent et lui fournissent la nacre et la perle. En 2013, cette femme à la douceur infinie crée sa marque : Pineapple culture.
« J’ai décidé de faire mes bijoux et de partir sur Hawaï. C’était ce que j’avais envie de faire : je ne voulais pas être coincée dans un bureau, mais être plus libre, pouvoir vivre de ce que je fais, en étant mobile. Au départ j’étais négociante, je vendais les perles de mes parents et je rencontrais les créateurs, les bijoutiers, je voyais les différentes techniques qu’ils utilisaient. Un jour, une de mes clientes m’a proposé d’échanger un lot de perles contre une formation de fonte d’argent. J’ai appris comme ça. »
Entre voyages et bijoux, Kahaia découvre aussi le surf : ce sport l’amène à découvrir l’Indonésie, la Birmanie, la Thaïlande… Elle parvient donc à lier ses passions pour trouver un équilibre et un mode de vie qui lui conviennent.
« A mes 34 ans je me suis dit qu’il fallait me décider : revenir en Polynésie ou rester à Hawaï ? J’ai hésité jusqu’à ce que je rencontre la personne. Et ça a été ici. Je reste. »
Un univers féérique
Cette maman de 38 ans utilise les inspirations et les coquillages récoltés au cours de ses voyages pour nourrir ses créations. Elle mêle les matériaux dans ses bijoux bruts :
« J’aime bien mélanger perles, coquillages, mabé [1], pierres semi précieuses. Je trouve que les couleurs se marient bien ensemble. Je préfère les choses un peu plus brutes, formées accidentellement par la nature. Ce qui est parfait, régulier, ce n’est pas trop pour moi. Et puis, un artiste n’est pas carré. Il est un peu comme l’eau, il va où ça mène. Là où il y a de la place, tu peux créer. »
A chaque étape de son processus de création, l’artisane s’évertue à partager son univers à travers ses bijoux :
« J’aime bien me démarquer. Par exemple je ne suis pas trop gravure ; je préfère le côté féérique avec les papillons. La nature a aussi beaucoup d’influence sur mes bijoux : ce qui m’inspire depuis que j’ai grandi ce sont les motifs de la Polynésie, comme sur les pareo style tifaifai. Je m’inspire de la mer, des fleurs.
Pendant la période d’abondance, j’ai une collection qui sera autour du cocotier. Les thèmes sont liés aux contes : c’est une Polynésie enchantée. »
Une nouvelle étape
« La création est facile, mais la vente c’est autre chose. Je n’ai pas fait des études pour rien (rires) ! J’ai fait le logo, les vidéos, le marketing pour Pineapple Culture. J’ai de la concurrence, il faut se démarquer par rapport au style, prendre un peu plus d’avance. »
Pineapple Culture ouvre sa boutique partagée à Tamanu : après onze ans d’existence, « il est temps » pour la marque d’avoir son espace. Kahaia pourra ainsi partager son univers et mettre en valeur ses bijoux, que les clientes pourront désormais essayer. Dans cette nouvelle étape, Kahaia partagera le dépôt vente avec d’autres créateurs pour mettre en avant des marques locales.
Également, avec son équipe de deux personnes à l’atelier, elle avance plus rapidement et a bénéficié de davantage de temps pour la création et les nouvelles idées :
« Je pense qu’une fois que tu es dans ce métier, les idées continuent toujours de venir. Je n’ai pas le temps de tout réaliser à cause de l’ampleur des commandes. La boutique, deux enfants, c’était toujours un challenge. Mais quand je vois mes bijoux portés, même les anciennes collections, je suis heureuse, reconnaissante. Je remercie les personnes qui ont toujours suivi la marque. J’espère continuer l’aventure de plus belle et voir, dans le futur, de nouvelles connections, les voir portées. Grâce aux gens qui portent les bijoux, je peux continuer. Et je veux continuer de créer. »
[1]Le mabe est le produit issu de la sécrétion de la nacre d’une huitre perlière autour d’un noyau synthétique. Celui-ci est collé sur la surface interne de la coquille.
Marie Lecrosnier–Wittkowsky
Rédactrice
©Photos : Marie Lecrosnier–Wittkowsky pour Femmes de Polynésie et Kahaia Howard.
Directeur des Publications : Yvon BARDES