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Évasion

Aline KV, l’abstrait instinctif dans le Pouring

Publié le 10 mars 2023

Sous la brise du petit jour, les embruns de la mer embaument le corps. Une étreinte salée dont seule la mer garde en ses écumes le secret. Et c’est au pied d’arbres profondément ancrés sur le littoral que Femmes de Polynésie rencontre Aline KV, une artiste peintre dont la technique du pouring1 anime ses jours. Des couleurs au mouvement, nous nous retrouvons dans l’épicentre de son inconscient.

DES VOYAGES ET DES TISSUS

Le voyage vers l’intérieur de ses souvenirs, tissu de son passé se découd d’un coup d’aiguille, une carte mentale sous la forme d’un patchwork de pérégrinations. Mais c’est d’un revers de la main que nous nous saisissons de l’essentiel.

« J’étais d’abord en France sur Toulon et lorsque nous nous sommes installés en Guadeloupe, je me suis imprégné des couleurs sans même faire de peinture. »

« Mais c’est justement là-bas que j’y ai été sensibilisé, essentiellement avec le genre naïf très coloré. »

Ces rencontres artistiques se font progressivement plus nombreuses, réveillant inconsciemment en elle-même cette sensibilité qu’elle entretient désormais.

« Et puis en chinant à Paris, je me suis arrêtée sur des lithographies à l’huile alors que je ne m’étais jamais intéressée à la peinture auparavant. »

DE LA PEINTURE A L’HUILE AU POURING

Chemin faisant, Aline continue son récit de vie avec sa famille sur Tahiti où elle y rencontre Jean-Luc Bousquet. L’artiste peintre lui instille des conseils en la dirigeant vers la peinture à l’huile. Aline reprend donc le dessin puis suit des cours avec Gaia.

« J’ai réalisé quelques expositions, notamment à la galerie de Raiatea. Puis des problèmes d’yeux m’ont obligé à lâcher le détail de la peinture à l’huile. »

Ainsi, progressivement, l’abstrait s’immisce dans sa vie sans qu’elle y prenne garde. Et c’est à la période du Covid qu’elle s’évade.

« En me renseignant, je suis tombée sur le pouring. Cependant, ici c’est compliqué car il n’y a pas tous les produits : je m’en inspire donc avec mes propres mélanges. » 

Débutent ainsi les phases d’expérimentations où, telle une apprentie sorcière, Aline prépare ses potions. 

« Ce qui m’a attiré c’est ce côté alchimiste, où tu crées tes propres couleurs. Je verse, j’essaye, j’en mets partout. » 

Et puis ce côté aléatoire, loin de sa nature profonde, la fait lâcher prise. 

« Même si tu essayes une technique, il y a cette alchimie par le climat. Quand il fait chaud la peinture ne réagit pas de la même manière lorsqu’il fait plus frais. Tu réalises donc des toiles en des circonstances particulières que tu ne peux refaire. » 

« On parle souvent de l’abstrait, comme le fait de jeter des taches. Ça y ressemble mais ce n’est pas le cas. C’est plus réfléchi par le choix des couleurs, le choix des pleins et des vides, des formes» 

L’ABSTRAIT INSTINCTIF

Un temps voltige pour qu’Aline trouve ses mots puis continue. 

« Avec la peinture à l’huile, tu veux exprimer un sujet que tu as déjà maturé dans ta tête. Tu veux donc absolument que ça en ressorte sur ta toile : c’est plus figuratif et tu tends vers la perfection du détail. » 

Quant au pouring, 

« C’est plus le geste, tu ne prémédites pas le sujet en lui-même, c’est plus un fil conducteur entre ton inconscient et ce que tu projettes sur la toile. » 

Conséquemment, l’expression se fait plus de manière vibratoire, un murmure qui se faufile nonchalamment dans les mains de l’artiste, la mettant dans un moment de méditation créative. 

« Quand tu es dedans, c’est intemporel, tu n’as plus de notion de temps. Tu es en osmose avec l’univers, plus rien n’existe : il n’y a que toi, ta création et le divin. » 

La matière de la peinture est bien moins travaillée, laissant entrevoir le travail brut qui se lie en harmonie. Une danse tellurique dont seule la nature, inspiration première d’Aline, en recèle le chaînon manquant. 

« Quand tu es dans cette transe, tu as envie d’y retourner à chaque fois. Alors ce n’est pas une échappatoire ! C’est plus un ancrage car ça te repositionne. » 

« J’aime ce que les émotions ressortent sur la toile et ça, tu ne peux pas réellement le projeter. Et puis il y a ce côté magique, ce que la peinture peut faire, ce que la matière est capable de créer toute seule avec ce geste. » 

Mais cette passion n’est pas un moyen d’expression voué à rester personnel. 

« L’art est là pour interpeller ou voir les choses différemment, dans un autre angle. De sortir de ce côté très matérialiste, très carré. » 

De ce fait, Aline souhaite prochainement réaliser une exposition pour toucher et interpeller. 

« J’aimerais partager ça avec les gens, savoir si d’autres personnes peuvent ressentir les mêmes émotions. Et même si des personnes n’aiment pas, j’aime que l’on échange, palabrer sur ce qui les gêne, etc. » 

1 Traduit par peinture fluide ou peinture coulée, le pouring consiste à faire des superpositions de couleurs, sur toutes sortes de supports et sans pinceau 

Manutea Rambaud

Rédactrice

©Photos : Manutea Rambaud pour Femmes de Polynésie

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