Tekura Amaru, se nourrir de culture et léguer son savoir-faire
Dans les jardins du Musée de Tahiti et des îles – Te Fare Iamahana, protégées du soleil ardent par l’ombre d’un ‘aito, Femmes de Polynésie s’assied aux côtés de Tekura Amaru. Cette vahine dévouée à sa culture nous livre son parcours, ses découvertes et ses ambitions.
CONQUISE PAR LA CULTURE
Tekura Amaru naît et grandit sur la côte ouest de Tahiti, au sein d’une famille nombreuse.
« Mataiea, c’est mon berceau. »
Entourée de ses frères et sœurs, de ses parents, tontons et taties, elle baigne dans une ambiance où les arts occupent une place importante.
« On aime chanter. La musique a toujours fait partie de nos vies… Mais mon intérêt pour la culture est venu bien plus tard. »
C’est au cours d’un voyage à Taiwan où elle représente la délégation tahitienne du CIOFF1, que ce déclic lui vient. C’est ainsi que Tekura se passionne pour la danse.
LA RENCONTRE AVEC LE CENTRE ARIOI
Après avoir obtenu une licence, elle se trouve face à un choix : poursuivre ses études supérieures ou commencer à travailler.
Finalement, intriguée par les activités du centre Arioi, elle décide d’aller à leur rencontre.
« Je suis passionnée de ‘ori tahiti, c’est exactement ce qui m’a dirigée vers le centre. »
Cependant, aucun poste n’est à pourvoir à ce moment-là. Hinatea Colombani, la fondatrice, lui propose néanmoins un stage d’insertion, en attendant qu’une opportunité se présente. Intégrée à l’équipe pluridisciplinaire du centre, Tekura s’intéresse aux différentes disciplines qui y sont pratiquées.
« En tant que danseuse, j’ai vu l’opportunité de m’ouvrir à ce monde. Et je me suis passionnée pour les percussions. »
DÉCELER SON PROPRE POTENTIEL
La jeune femme se découvre donc de nouveaux centres d’intérêt et plonge la tête la première dans cet apprentissage.
« J’affectionne particulièrement le tō΄ere. »
Moeava Meder, co-fondateur et professeur de tō’ere, la prend sous son aile. Grâce à lui, elle apprend non seulement à jouer, mais découvre également la théorie musicale.
« J’ai compris la chance que j’avais de pouvoir apprendre aux côtés de Moe. Je m’intéresse particulièrement à l’histoire des instruments. Par exemple, le tō΄ere ne fait pas partie des instruments originaires de Tahiti. »
Grâce à l’expertise de Moe mais aussi celle de Poehei Temaiana, Tekura progresse rapidement. Elle se met à poster des vidéos d’elle sur Facebook en train de jouer du tō΄ere. Ces vidéos attirent un nombre croissant de vues et l’encouragent à aller plus loin.
« Ça m’a donné envie de me perfectionner et, à l’avenir, de transmettre. »
S’ENRICHIR ET PERPÉTUER
Aujourd’hui, cela fait sept ans que Tekura Amaru fait partie de l’équipe du centre Arioi.
« J’ai une préférence pour les ados. C’est un vrai challenge de travailler avec eux, c’est un public que j’apprécie. »
Ces moments de transmission sont également réservés à des publics plus spécifiques. En effet, en partenariat avec la DPJJ1, le centre Arioi prend en charge des jeunes en réinsertion judiciaire ou en situation de handicap.
« Avec eux, la relation est particulière. Je pense que ça vient du fait que je suis maman…»
Avec une bienveillance sans égale, Tekura jongle entre sa pratique personnelle et la transmission de son savoir-faire.
PROJECTIONS ET AMBITIONS
Son parcours atypique reflète sa vision originale et engagée de la culture polynésienne.
« De ce que j’observe, je pense que les filles et les femmes se dirigent plus vers le ‘ori tahiti dans le monde culturel. »
Bien éloignée des clichés, elle encourage les autres Polynésiennes à suivre un chemin qui ne serait pas tout tracé par les attentes d’autrui.
« Je rêve de voir un jour au Heiva, un orchestre exclusivement féminin… ce qui ne serait pas impossible si on rassemble les belles pépites, bien que rares, de chaque groupe. »
L’ambition qui l’anime nous exhorte à voir plus loin, à rêver plus grand, pour une culture toujours plus inclusive et florissante.
1 Conseil international des organisations de festivals de folklore et d’arts traditionnels
Rédacteur
©Photos : Cartouche, Centre Arioi et Tekura Amaru pour Femmes de Polynésie
Directeur des Publications : Yvon BARDES