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Culture

Moena, le ‘Ori Tahiti à l’heure internationale !

Publié le 25 juillet 2019

Moena Maiotui est une de nos plus célèbres ambassadrices du ‘Ori Tahiti. Aujourd’hui elle passe une grande partie de son temps dans les avions, pour dispenser aux quatre coins du monde ses workshops, très prisés par les amateurs de danse tahitienne. Elle revient sur son parcours et raconte à Femmes de Polynésie ses activités actuelles.

La maman de Moena est née aux Marquises, son papa est originaire de Makatea, mais elle a aussi du sang breton et anglais, de l’île de Pitcairn. Elle a un frère aîné, surfeur comme son papa, deux demi-sœurs et un demi-frère.

UNE ENFANCE JOYEUSE

Ses parents se sont séparés quand elle avait quatre ans, et Moena s’est bien adaptée au nouveau rythme – la semaine chez maman et le week-end chez papa, passant aussi beaucoup de temps chez sa grand-mère paternelle dont elle était très proche.

« Ma maman dit que je danse depuis que je sais marcher. A l’âge de 4 ans, j’ai intégré les cours de Makau Foster, où j’ai passé 4 ans avant de rejoindre le Conservatoire. »

Sa maman, qui dansait avec les troupes Toa Reva et O Tahiti E, est un bel exemple pour la petite Moena, dont le parcours artistique commence à se dessiner en poursuivant sa formation avec les cours de Lorenzo à Vital California.

En 1997, sa maman et son beau-père (ancien rameur devenu danseur) participent au Heiva avec O Tahiti E, et un petit rôle est attribué à Moena, alors âgée de 10 ans :

« À la fin du spectacle, j’entrais sur scène pour apporter une petite lumière. C’était mon premier Heiva. »

Elle continue pendant deux ans avec la même troupe.

LES GRANDS BALLETS DE TAHITI

En 1999, Moena suit Teiki, Lorenzo et Tumata Robinson dans l’aventure naissante des Grands Ballets de Tahiti. Ce seront neuf années pendant lesquelles cette troupe à succès se déplacera beaucoup, en France, à Hawaï, au Canada. A 15 ans, Moena pose les pieds pour la première fois au Japon – un pays où elle retournera régulièrement des années plus tard.

TAHITI ORA

Enrichie de l’expérience des Grands Ballets, Moena suit Tumata Robinson qui crée la fameuse troupe Tahiti Ora. Pour l’anecdote, c’est Moena elle-même qui en a trouvé le nom .

« Du temps des Grands Ballets, j’étais la soliste, uniquement danseuse, mais avec Tahiti Ora je devenais aussi chorégraphe. Et en partant de rien, au bout de trois mois, nous avons créé notre premier spectacle que nous présentions au Beachcomber 1 les mercredis et parfois aussi le samedi. »

A partir de 2009, Tahiti Ora se produit régulièrement au Méridien2, et Moena en est la chorégraphe et lead danseuse.

En 2010, la troupe s’envole pour Shanghai pour l’Exposition Universelle, et danse au pavillon français pendant trois semaines. À cette occasion, un producteur japonais, qui avait déjà repéré Moena, lui propose de venir enseigner au Japon. Avec l’accord de Tumata, elle commence son premier workshop un mois plus tard.

« C’était assez stressant. Je connaissais le Japon mais pas en tant que prof. J’avais enseigné deux ans avec Tumata à Tahiti, mais c’était très différent. Là-bas, je connaissais à peine la personne qui m’a recrutée, il y avait des petits soucis de traduction, et j’étais toute seule ! »

Le rythme des cours était soutenu, quatre jours par semaine de 10 heures à 17 heures, par tranches d’une heure et demi.

Il faut savoir qu’au Japon, les écoles de danse tahitienne ouvrent à une cadence folle, il y en a sans cesse de nouvelles, créées par des Japonais. Moena se retrouve parfois sollicitée pour donner son avis sur le nom choisi. Rappelons au passage qu’il y a plus de pratiquants du ‘Ori Tahiti au Japon que d’habitants en Polynésie Française ! C’est devenu un véritable phénomène de société au pays du soleil levant.

2011, LA CONSECRATION

C’est lors du Heiva de 2011 que Tahiti Ora rafle un palmarès impressionnant. Moena est alors chorégraphe, avec sa copine Poerava Taea.

« C’était un challenge parce qu’en plus de ma préparation, il fallait driver la troupe et faire preuve d’autorité, alors que je n’avais que 24 ans et que je devais diriger des femmes qui avaient parfois dix ans de plus que moi. »

Tahiti Ora remportera cette année-là le Heiva, ainsi que d’autres prix, dont le meilleur costume végétal (créé par Freddy Fagu). Moena est désignée comme la meilleure danseuse.

Auréolée de ce succès, elle est d’autant plus boostée pour ses workshops. Grâce à internet, ses vidéos commencent à circuler sur la toile.

DES WORKSHOPS A L’INTERNATIONAL

Le ‘Ori Tahiti commence à inspirer le monde entier et à séduire de plus en plus d’adeptes sur tous les continents. C’est ainsi que Moena se retrouve à enseigner aux Etats-Unis, Hawaï, Mexique, Malaisie, Taïwan, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, et bien sûr, au Japon.

« Un jour, une professeur de belly dance en Malaisie m’a vue sur une vidéo, et séduite par nos danses m’a proposé d’enseigner en Malaisie. »

Aujourd’hui, il existe un Heiva à Taïwan, au Mexique, à San Diego, à San Francisco, et trois Heiva au Japon – à Tokyo, Osaka, et Fukuoka.

« J’enseigne sous le label Tahiti Ora, et c’est Tumata qui gère mon agenda et mes déplacements. Entre 2014 et 2017, il m’arrivait de faire trois déplacements en un mois, et ce n’est pas un rythme évident à tenir. C’était pire qu’une hôtesse de l’air ! »

Il lui arrivait de faire 5 villes différentes au Mexique, ce qui implique 5 chorégraphies différentes, car les spectacles étaient ensuite présentés dans des concours.

PROTEGER LE ‘Ori Tahiti

Face à son succès mondial, un courant tente de répertorier officiellement les bases du ‘Ori Tahiti. Moena participe au recensement de l’ensemble des pas de danse.

« Je ne trouve pas normal que des gens qui n’ont jamais mis les pieds en Polynésie se décrètent professeurs de ‘Ori Tahiti. »

Le Conservatoire a mis en place des stages pour les étrangers, où, au bout de six ans d’apprentissage, ils sont diplômés et peuvent enseigner. Le problème, c’est que tout le monde ne suit pas ce cursus. Beaucoup apprennent d’après des vidéos sur Youtube, ce qui résulte en une mauvaise imitation. Le ‘Ori Tahiti se retrouve confondu avec le Hula hawaïen, voire le Twerk, et se voit ainsi dépourvu de sa dimension culturelle.

« Jadis, on dansait pour célébrer quelque chose. Il n’y avait pas de pas prédéfinis, chacun dansait comme il le voulait. A Hawaï, ils ont commencé à répertorier les mouvements de leurs danses, sauf qu’ici on a différents courants : chaque chef de troupe a sa façon de nommer les pas, et même si on a réussi à recenser nos gestes, cela n’empêche pas de continuer à faire un peu comme on veut. Moi, j’enseigne sur les bases du Conservatoire. »

Le répertoire du Conservatoire a été conçu, il faut le noter, essentiellement par des femmes. Et c’est par sa vision de la vahine dans la société polynésienne actuelle que Moena conclut notre entretien.

« Aujourd’hui la femme est sortie des clichés anciens. C’est une bosseuse, une fonceuse, elle sait ce qu’elle veut. Même maman, les femmes pratiquent le ‘Ori Tahiti et organisent leur planning pour vivre aussi leur passion. Je suis admirative de ces femmes qui dansent et qui jouent leur rôle de mère. Je me demande si, lorsque j’aurai des enfants, j’en ferai autant, et si je pourrai continuer la danse. »

Mais on peut faire le pari que Moena, qui a le ‘Ori Tahiti dans le sang, continuera longtemps à pratiquer, à enseigner, et à se passionner pour son art et sa culture, dont elle est une formidable ambassadrice.

1 aujourd’hui l’hôtel InterContinental

2 aujourd’hui l’hôtel Tahiti Ia Ora Beach Resort

Laurent Lachiver
Rédacteur web

© Photos : Laurent Lachiver, Moeana Maiotui

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