Femmes de Polynésie Retrouvez nous sur
Site de Femmes de Polynésie Hommes de Polynésie

Je passe
d'un site à l'autre

Culture

‘Ā’amu, peindre la réalité dans le respect de la liberté (2/2)

Publié le 11 décembre 2024

Notre entrevue avec Christine Fabre, dite ΄Ā΄amu1 pour sa capacité à raconter des histoires et transmettre des émotions à travers ses peintures, continue en même temps que la descente de l’astre du jour vers l’horizon.

PROGRESSER POUR PERDURER

Depuis plusieurs années, le nom de Ā΄amu se lit sur les lèvres des amateurs d’arts en Polynésie. Pourtant, il a fallu du temps à Christine Fabre pour oser sortir de sa coquille en forme d’atelier.

« Ça n’a pas été facile d’exposer, je ne me sentais pas légitime. Il a fallu me pousser. »

Lors de sa première exposition personnelle à la salle Muriavai, Christine a pourtant dévoilé pas moins d’une soixantaine de tableaux. Mais, à l’approche du vernissage, on lui diagnostique un cancer du sein.

« La peinture m’a gardée la tête hors de l’eau. »

Tant pis ! Elle ne lâche pas pour autant ses pinceaux. Malgré les traitements médicaux, elle ne cesse de peindre, de fignoler, de créer, non seulement pour le public mais surtout pour elle-même, s’offrant ainsi le plaisir d’essayer de progresser continuellement.

« En effet, ayant commencé à peindre bien tard, j’ai du coup toujours l’impression de pouvoir encore progresser, et c’est vraiment très stimulant ! »

Dorénavant en rémission, sa fièvre créative, elle, ne l’a jamais quittée.

« L’avantage de mon âge en plus c’est que je ressens que je n’ai désormais « plus rien à prouver ». Je peins vraiment pour le plaisir. »

EMBRASSER L’IMAGINAIRE

« J’ai grandi à une époque où on n’avait pas la télévision, où aller au cinéma n’était pas fréquent. Pour moi, les images, c’est ce que l’on nous donnait à l’école quand on était bien sages. C’était toujours des jolies illustrations, ou des miniatures de peintures que je trouvais tellement belles et dont la réalisation excitait beaucoup ma curiosité. »

L’univers d’’Ā΄amu oscille entre réalisme et onirisme. Voltigeurs aguéris, ses traits de pinceaux virevoltent sur la toile, légers et précis.

Représentation du ti'i A'a : "Dans le froid de l'exil" 2019

« Il y a le respect de la réalité à peindre, et le respect de la liberté d’imaginer. »

En 2020, pendant le covid, elle redécouvre cette peinture, et décide de « déconfiner A’a » en le faisant s’évader… Puis, en  2021, préparant sa nouvelle exposition salle Muriavai, elle se prend au jeu et décide que maintenant il a dû arriver au fenua ! C’est alors qu’elle le peint sur sa pirogue, passant au large de Moorea. Enfin, en 2024, elle le présente de retour à Rurutu, face à l’océan, dans un monde où « Pourtant tout a changé »…

« Mon univers natal, c’est la neige. À quatre ans, on nous mettait sur des skis. Mais pendant longtemps, cette peinture de A’a est restée retournée face au mur dans mon atelier. Je me disais que ça n’intéresserait personne. »

"L'évasion" 2020

« La peinture est comme la vie, l’occasion permanente de prises de risques, et où il importe d’être à l’écoute de ce que l’on aime, et d’oser se lancer. »

En 2021, elle expose à nouveau à la Maison de la culture. Elle y propose les trois tableaux représentant le Ti΄i A΄a2 : dans « le froid de l’exil » londonien, puis son évasion du British Muséum, et enfin son retour au fenua, deux ans avant même que l’on apprenne qu’il va effectivement revenir au Musée de Tahiti et des îles – Te Fare Iamanaha !

Ses peintures sont donc prémonitoires lui dira son public !

"Le retour de A'a" 2021

EN ÉCHO À LA CULTURE

En insérant des éléments de la culture polynésienne dans ses œuvres, Ā΄amu cherche à rendre hommage à sa terre d’accueil.

« J’espère que les gens se sentent touchés par mes peintures, parce que c’est leur culture qui les imprègne et que je cherche à la connaitre, ainsi qu’à la faire connaitre et respecter. »

Guidée par sa sensibilité, elle ne cherche pas à recréer des clichés de carte postale, mais à exprimer une vision qui lui est personnelle.

« Je ne me place pas du côté des clichés, ça ne m’intéresse pas. Ce qui me plaît, c’est peindre ce que je ressens. »

Un dernier regard lancé aux portraits de Henri Hiro, Jean-Marc Pambrun, Michèle de Chazeaux et bien d’autres qui tapissent les murs de son atelier, et nous quittons les lieux, le cœur empli de promesses.

1 Récit, conte, histoire, sornettes, légende (faits réels ou imaginaires)

2 La statue du dieu A’a, en reo rurutu Ti’i ‘A’a, est une sculpture sur bois originaire de Rurutu dans l’archipel des Australes et représentant la divinité A’a. Elle est probablement réalisée entre 1591 et 1647, les premières mentions traçables de l’œuvre datant de 1821. C’est à cette époque que la sculpture est donnée aux missionnaires de la London Missionary Society (LMS) par des insulaires pour marquer leur conversion au christianisme. La statue est alors amenée à Londres, où elle est exposée, d’abord au musée de la LMS, puis au British Museum. Depuis 2023, elle est prêtée et exposée au musée de Tahiti et des îles – Te Fare Iamahana, à Punaauia.

Cartouche

Rédactrice

©Photos : Cartouche, ‘Ā’amu pour Femmes de Polynésie

Directeur des Publications : Yvon BARDES

Pour plus de renseignements

Sites internet

facebook

instagram

À découvrir également :

Partagez Maintenant !

Femmes de Polynésie - Facebook

Newsletter

Abonnez-vous à notre newsletter pour recevoir du contenu de qualité

* En cliquant sur VALIDER, nous attestons que l'adresse mail ne sera utilisée que pour diffuser notre newsletter et que vous pourrez à tout moment annuler votre abonnement.