Ursula, du sel made in fenua
A Rangiroa, une famille s’est lancée dans la fabrication de sel. Un concept novateur monté sur fonds propres sous le nom de « Tahiti Sel ». Femmes de Polynésie a eu la primeur de rencontrer celles par qui toute cette aventure familiale a débuté.
UNE IDEE ORIGINALE
Punaauia, parc Vairai, c’est au pied du ficus trônant face à la mer que nous retrouvons deux sœurs, Ursula et Hélène. Deux femmes radieuses et enthousiastes à l’idée de nous présenter leur « bébé » : du sel made in fenua. Sur un présentoir improvisé ont été disposés des sachets contenant le précieux condiment. Une déclinaison de 5 parfums conçue artisanalement à Rangiroa. Une première en Polynésie !
« Nous voulions développer une source économique nouvelle en Polynésie et promouvoir celle-ci à travers le monde. Tahiti est un nom encore vendeur, c’est la raison pour laquelle nous l’avons appelé Tahiti Sel ! »
A la source du projet : Ursula. Elle est partie d’un constat simple : « Pour un pays entouré de mer, comment se fait-il que nous n’ayons pas de fabrique à sel ? ». Il ne lui en fallait pas plus pour se renseigner, s’informer et s’intéresser au métier de saunier. Au terme de deux années de recherche, une formation à distance auprès d’un maître saunier de l’ile de Ré, une étude de marché, un montage financier et une phase de test concluante, elle a mis sur pied son entreprise.
« Résultat, j’ai embarqué ma famille dans mon désir de produire du Sel. »
Par « embarqué » il faut comprendre : production artisanale. Le circuit de fabrication ne compte ni machines, ni appareils mécaniques. Du prélèvement à la source sur un îlot vierge de Rangiroa et Puka-Puka à l’emballage, tout est fait main. Une fierté pour Ursula qui avoue avoir eu des périodes de doutes, heureusement vite dissipées car bien entourée.
« Ma relation avec ma famille est proche et complice. Mon père, originaire des Gambier, était chauffeur poids lourd et ma mère, fille de Rangiroa, faisait de l’artisanat. L’amour dans lequel j’ai grandi m’a permis d’avoir confiance en moi, de respecter les autres et surtout d’accepter la différence qui est la richesse du monde. »
Ils ont évidemment été les premiers à la soutenir dans sa démarche. Avec une sœur pâtissière, la question du développement en laboratoire de sel parfumé a été grandement facilité. On peut ainsi en plus du gros sel vierge, très doux en bouche, savourer du sel parfumé à la papaye ou à la mangue ainsi que du sel aromatisé au citron et à l’ananas, fort en goût. Deux propositions qui agrémenteront parfaitement plats, sauces et pâtisserie.
« Je suis heureuse d’avoir pu marier nos produits du fenua au sel que nous récoltons. Cela a été une belle découverte gustative et ce n’est que le début ! »
Au goût il faut ajouter le packaging, et question marchandising tout a été pensé, réfléchi et réalisé pour que consommateurs locaux et internationaux soient addicts au sel de Tahiti. Cerise sur le gâteau, la jeune firme propose de la fleur de sel made in Rangiroa et Puka-Puka. Une récolte précieuse qui vaut son pesant d’or au même titre que le sel de Guérande.
« Entreprendre m’a toujours fait du bien et me permet de m’épanouir complètement. »
URUSULA AND CO.
Est-il besoin de préciser que ce produit se retrouvera exposer au salon Made In Fenua du 2 au 5 mai prochain ? Et bien voilà qui est fait. Maintenant de même que le produit offre des possibilités infini de développement, voyez comment Ursula s’est forgé un tempérament d’entrepreneuse.
Ursula a commencé à travailler à la poste à partir de 20 ans puis elle s’est orientée vers le privé dans le secteur des ressources humaines et ensuite dans le commerce. Une vie professionnelle riche et variée où elle a pu découvrir un vaste panel d’emplois allant de l’administration au privé.
« A certaines périodes j’étais entrepreneur, je confectionnais des bijoux puis j’exerçais dans la restauration et de nouveau dans la création de bijoux, puis dans l’organisation d’évènements pour différentes associations. J’ai toujours eu le besoin d’entreprendre, avoir un emploi même à temps plein ne me satisfaisait jamais entièrement, j’avais le sentiment d’être incomplète. »
Ursula aime le métier qu’elle occupe actuellement au sein des Télécoms, mais elle avoue qu’elle aime encore plus l’activité salicole qu’elle occupe en parallèle. Elle a, comme beaucoup, traversé des moments difficiles comme les années de « blanc » : pas d’emploi, absence d’idées et de motivations.
« J’en retiens que la confiance en soi nous permet à chacun de ne pas perdre pieds et de surmonter les obstacles. »
Une persévérance à toute épreuve qui lui permet de se projeter, et dans 10 ans elle se voit travailler pleinement dans une de ses salicultures. Ce qui en dit long sur sa motivation et ses perspectives d’avenir : une entreprise florissante et respectueuse d’un savoir-faire. Ursula n’a ni mentors, ni idoles et n’est fan de personne ou presque.
« Je suis en admiration devant les jeunes entrepreneurs de part le monde et en Polynésie. »
Ursula est une femme à l’entêtement certain, il en faut pour mener à bien un tel projet. Pour autant il est un rêve irréalisé qu’elle a noté dans un coin de sa tête : « Être astronaute et archéologue, j’ai toujours été attiré par l’inconnu, rêveuse même ! ». De l’humour, elle n’en manque pas comme dans cette réponse à cette question improbable : Qu’est-ce que vous aimeriez que l’on dise de vous une fois mort ? « Et dire qu’elle aurait dû faire cette croisière toute seule ! Et non elle a embarqué le reste de la famille ! »
Des êtres chers qu’elle appréhende de perdre.
« J’ai eu une enfance heureuse avec une éducation partagée entre ma grand-mère paternelle Paumotu reclue dans une idéologie à l’ancienne, (balais ni ‘au et prière à genoux tous les soirs sans exception, cheveux tressés serrés obligatoires ! Et vêtement à col fermé …) et ma mère qui était notre militante à notre petit groupe de filles. Elle militait pour l’égalité des sexes, des tâches ménagères et nous contais le monde, elle avait une ouverture d’esprit que j’admirais, le monde était pour elle une fête foraine à découvrir, mais qui en même temps était son rêve irréalisable qu’elle réalisera pourtant quelques années après avec le soutien de ses filles (en ce temps c’était les 4 filles) »
Vous l’aurez compris, Ursula est de cette race de femmes avec un parcours de vie qui la conduit par trois fois à déménager de son Tuamotu natal, qui si elle avait pu se donner un conseil à 20 ans se serait dit : « Le monde est immense, lève-toi n’ai pas peur, vas-y pars à la découverte du monde ! »
A ses yeux : « Etre Ma’ohi c’est respecter et partager les valeurs de la communauté Ma’ohi à laquelle on appartient, par le cœur ou par le sang. C’est respecter les hommes et vivre en harmonie avec mère nature, c’est enfin s’ouvrir un peu plus au « Mana » et savoir interpréter les signes qu’il nous envoie pour être guidé. »
Comme Ursula « Vivez vos rêves, ne baissez pas les bras, soyez optimiste et gardez confiance en vous ! ». Lorsque nous quittons ce duo de jeunes femmes, elles discutaient encore de marketing. Si vous tout comme nous, vous avez été séduits par la personnalité d’Ursula, vous aurez l’occasion de pouvoir échanger sur son entreprise familiale à Toata !
Plus d’informations
Entreprise : EI.Miti
Contact : SANFORD URSULA
Métier : Producteur de sel (Saunier)
BP45090 – 98713 Papeete
Téléphone : 87 79 66 81
Mail : tahiti.sel@gmail.com
Facebook : tahiti sel
Jeanne Phanariotis
Rédactrice web
© Photos : Femmes de Polynésie