Raihei, à la conquête des mystères des plantes locales
Un sourire lumineux et les yeux brillants, Raihei White vient de se lancer dans l’aventure du doctorat avec une mission… Découvrir les propriétés secrètes du Uru et du Fe’i. Femmes de Polynésie a rencontré cette jeune femme dynamique et passionnée.
Des souvenirs des ra’au
Élevée à Papeete, Raihei garde des souvenirs des jardins, des plantes et des ra’au Tahiti qu’elle associe à sa grand-mère. Depuis toute petite, elle nourrit une fascination pour les plantes.
« Je trouve qu’il y a de la beauté dans les plantes… Être entourée de vert, de leur présence, ça m’a toujours attiré et apaisé. Je crois que ces moments m’ont donné l’envie et le goût de travailler sur les plantes. »
Elle quitte le fenua à l’âge de 18 ans pour faire ses études en France et pour 6 ans d’expatriation en métropole.
« C’était une très belle expérience, une ouverture sur le monde, ça m’a sorti de ma bulle. J’ai retrouvé d’autres amis tahitiens et ça m’a motivé à faire mes études. »
Raihei est remplie de gratitude vis-à-vis de cette expérience métropolitaine qui lui a appris à être autonome, à prendre des décisions ou encore, que tout est possible et qu’une réorientation ne correspond pas forcément à un échec.
L’aventure des molécules
Raihei obtient une licence de Biochimie puis commence un Master de biochimie végétale à l’Université de Toulouse. Entre sa première et deuxième année, elle revient en Polynésie pour réaliser un stage de cinq mois au sein de l’équipe de recherche UMR 241 EIO de l’Université de la Polynésie Française, sous la direction de Taivini Teai.
« J’ai beaucoup appris et j’ai pu comprendre des liens entre des plantes, leurs molécules et leur rôle pour la santé ou le quotidien des gens… »
À la fin de son Master, Raihei obtient un CDD chez Clarins où elle travaille sur les propriétés anti-inflammatoire et hydratante des produits de cosmétologie.
« Je me suis aperçue qu’il me manquait la partie recherche. Je suis fascinée par les molécules, la compréhension des propriétés d’une plante… Les plantes, ce sont des machines à synthétiser, elles ont beaucoup de secrets et nous aident au quotidien. C’est passionnant de les étudier car on a l’impression de contribuer aux connaissances pour soi et pour les autres. »
Nostalgique de son expérience à l’Université de Polynésie française, Raihei n’hésite pas à revenir au fenua quand l’équipe de Taivini lui propose de réaliser sa thèse sur le Uru et le Fe’i.
« Il y a tellement de réponses dans la nature et ici, nous avons beaucoup à apprendre de nos plantes locales. »
Découvrir les propriétés de nos plantes traditionnelles
Raihei vient d’entamer sa première année de thèse, « la grande aventure ». Elle est impatiente de se plonger dans le vif de son sujet.
« Je dois commencer par faire un état des lieux des connaissances, des pratiques, des usages… J’ai hâte car il y a beaucoup à faire pour améliorer nos connaissances sur les fruits, les feuilles, les plantes locales. »
À la recherche de différentes propriétés qui pourraient ralentir le vieillissement de la peau ou agir sur certaines maladies, Raihei effectue des collectes et des analyses sur le Uru. Le fruit de l’arbre à pain compte deux grandes variétés dans le monde, mais il y a plus d’une trentaine de sous-variétés en Polynésie, dont certaines spécifiques au fenua. Dynamique, passionnée et ravie de retrouver sa famille qui lui a tant manqué, elle voit cette opportunité comme une manière de renouer avec des pratiques d’antan et de contribuer au progrès de la société polynésienne.
« Beaucoup de choses ont changé depuis 6 ans. Il y a plus de festivals, de salons, de possibilités d’études… Il manque encore de travail pour les jeunes mais j’ai vraiment l’impression que ça bouge et c’est vraiment motivant. »
Céline Hervé Bazin
Rédactrice web
© Photos : Céline Hervé Bazin, Raihei White