La facette méconnue de Hinarere Taputu
Quand on tape son nom sur Google, on obtient plus de 40.000 résultats. On a beaucoup écrit sur Hinarere Taputu, très médiatisée lors de son règne de Miss Tahiti 2014. Femmes de Polynésie s’est intéressé à la jeunesse de notre purotu et à sa vie d’aujourd’hui, sans oublier son indissociable expérience de Miss.
Hinarere vient tout juste de présenter, il y a quelques jours, l’élection de Miss Tahiti 2019 aux côtés de Stéphane Plaza, quand nous retrouvons entre deux réunions celle qui reste pour beaucoup « notre » Miss, tant elle a été populaire.
Inévitablement, l’image de Miss Tahiti lui colle à la peau, avec les bons et mauvais côtés. Pourtant aujourd’hui, elle s’affirme en tant que femme dans son milieu professionnel, après son Master en gestion et finance hôtelière.
« Le réseau de connaissances dont j’ai pu bénéficier grâce à la notoriété du titre Miss Tahiti est éphémère, il faut savoir l’entretenir. Tandis que mes diplômes et ma force de caractère, c’est ce qui fait ce que je suis aujourd’hui. »
Une femme active dans le tourisme
Hinarere fait partie de la génération des réseaux sociaux. Un outil qu’elle utilise quotidiennement. Elle a été Community Manager et Chargée des Contenus Numériques, et s’occupe aujourd’hui des Relations Publiques et de la communication à Tahiti Tourisme…Son objectif : s’affirmer en tant que professionnelle et mettre en œuvre un plan de carrière, où elle soit reconnue pour ses compétences et son savoir-faire.
Oui, on la découvre sous un angle différent… Elle confie d’ailleurs que ça n’a pas été facile de faire la transition entre la période des Miss et son job, car elle a été doublement attendue au tournant : se défaire de son image de reine de beauté tout en démontrant ce qu’elle était capable de faire professionnellement.
« Les plateaux TV et radios, et le monde des médias sont des vecteurs de la communication importants mais également intransigeants. J’en parle aujourd’hui car deux mondes me séparent, celui de la jeune femme devenue Miss Tahiti en forte exposition personnelle et d’image, et cette femme que je suis aujourd’hui, à la conquête d’une vie professionnelle accomplie et heureuse de travailler pour l’un des secteurs économiques les plus importants pour le développement de notre Pays, le Tourisme. Je me souviens encore de mon premier JT en tant que Community Manager, pour présenter la nouvelle campagne de sensibilisation locale au tourisme, confiée à Tahiti Tourisme par le Ministère du Tourisme. Dans ce type de situation, il faut savoir s’affirmer et bien maîtriser ses sujets. On est porteur d’une image, d’un message. Il faut se préparer à toute éventualité. Il n’y a pas de secret, ou de formule magique, il faut travailler, étudier, se challenger, se remettre en question. »
Hinarere ne reste pas insensible aux commentaires qu’elle peut lire sur les réseaux sociaux. Toute critique constructive est fondée sur un jugement personnel, il faut savoir la considérer et l’évaluer. En revanche, il faut également savoir se protéger contre la violence des mots, ce qui n’est pas toujours évident, elle l’avoue. Malgré la carapace qu’elle a pu se construire au fil du temps, elle estime avoir beaucoup de chance pour s’en préserver, d’avoir sa famille, ses amis et des références telles que Dominique Petras, Leiana Faugerat, Claude, sa belle-mère.
« Je me dis aujourd’hui : Hinarere, sois la femme que tu veux vraiment être ! ». On ne peut pas plaire à tout le monde. La notoriété, lorsqu’elle vient avec son parcours et particulièrement celui d’une Miss, on doit l’assumer et autant que possible chercher à en faire quelque chose de positif. Oui, les réseaux sociaux sont parfois impitoyables et quelquefois paraissent injustes. Mais, il faut savoir prendre du recul et évaluer le degré d’importance de la critique… Leur côté négatif est un revers qu’il faut accepter et vivre avec philosophie. Ce qui m’importe surtout, c’est de retenir ce qu’ils peuvent avoir de bon, leur puissance positive et immense lorsqu’ils deviennent communauté de soutien et de diffusion autour d’une personne, d’un projet, d’une politique, d’une cause. Je n’oublie pas à quel point ils ont été fondateurs dans mon élection passée et combien ils sont encore pour moi aujourd’hui le soutien de personnes qui prennent du temps pour me guider, me conseiller, m’épauler. »
Hinarere a passé des années dans les strass et les paillettes, mais elle se souvient de l’époque de son enfance, où elle était garçon manqué, où elle n’aurait jamais imaginé apparaître un jour dans un journal TV. Et quand on lui rappelle la fameuse phrase « Miss un jour, Miss toujours », elle précise que ce moment ne dure qu’un an.
L’enfance et l’adolescence de Hinarere
Cela peut surprendre, mais dans son enfance, Hinarere était quelqu’un de très introverti et un vilain petit canard.
« J’étais un bébé très laid ! »
Elle confesse qu’elle n’était pas gâtée par la nature, avec en plus différents soucis de santé, alors que ses deux sœurs, Iritia et Hinanui, étaient de jolies petites poupées. Même la danse classique ne convenait pas à cette enfant, qui allait prendre la plus belle des revanches des années plus tard.
Une époque authentique où l’on jouait à la marelle et à la corde à sauter, bien loin du monde virtuel d’aujourd’hui, où on essaye de travailler son apparence. Elle a grandi dans la famille très nombreuse de son papa, entourée des fous rires et des disputes avec les cousins et cousines, mais également avec l’école du Dimanche.
Ce furent des années où l’on vivait ensemble, collectivement, parfois le weekend à quinze dans une maison. Son papa adoptif, son « deuxième papa » comme on dit ici, était un Monsieur des Australes qui s’appelle Alphonse Riaria, nom qui nous rappelle une autre Miss Tahiti : Mehiata.
« Il m’emmenait à l’école dans sa camionnette Peugeot à benne, jouant du klaxon. C’était beaucoup plus authentique qu’aujourd’hui. Il me disait : « Attention, la limousine arrive ! » ».
Son grand-père maternel lui disait pourtant que le vilain petit canard se transformera un jour en plus beau cygne du lac. Plus tard, c’est pendant ses études et ses différentes expériences qu’elle mûrit, gagne en confiance et apprend à s’auto-gérer.
Miss Tahiti, Miss France, Miss Monde
Elle résume ce moment de sa vie par les mots COURAGE, DÉTERMINATION, RECONNAISSANCE. C’était plus un rêve de famille qu’un rêve personnel. Chaque élection a été un challenge qu’elle s’est fixé et qu’elle a relevé brillamment, grâce à sa famille qui a été un véritable pilier. Rappelons qu’elle a été 1ère dauphine de Miss France et 5ème dauphine de Miss Monde !
Les goûts et les couleurs divergent, et de ce fait, dans le bain de médiatisation qui a été son quotidien pendant longtemps, Hinarere préfère se souvenir des nombreux commentaires positifs et du regard innocent et pur des enfants, de ces petites filles aux yeux étincelants qui rêvent devant ce titre qu’est Miss Tahiti. Mais également des mamas avec leur spontanéité et bienveillance « Haere mai bébé ».
« Avec le regard émerveillé des enfants, j’ai réalisé que le titre de Miss Tahiti apportait du bonheur aux gens. Et je me suis revue, enfant, lorsque moi-même j’admirais Miss Tahiti, notamment Mareva George, avec son côté altruiste, amoureuse de la Polynésie, qui est devenue business woman accomplie. Elle est un modèle de femme affirmée et engagée. Mais, notre vie ne doit pas tourner autour d’un titre de Miss Tahiti, c’est un tremplin qui permet de se découvrir, d’évoluer, de se projeter. »
En quête de nouveaux challenges
Aujourd’hui, Hinarere bouillonne d’idées et de projets. En plus de ses activités professionnelles dans le domaine du Tourisme et des représentations évènementielles pour lesquelles elle est de plus en plus sollicitée, elle ambitionne de conforter ses talents de présentatrice en investissant davantage le monde des médias, et pourquoi pas, en concevant et développant des idées d’émissions ou de blogs autour de la création polynésienne, les Arts, sous toutes leurs formes.
Son engagement sociétal au service du Pays, elle souhaite aujourd’hui l’exprimer par un investissement plus permanent au sein d’une association qui lui tient à cœur. Enfin, toujours encline à vouloir se perfectionner, elle entend reprendre ses études avec l’objectif de parler couramment le Tahitien et de se spécialiser plus encore dans les nouvelles technologies de l’information et de la communication.
« J’ai conscience qu’à l’aube de mes 30 ans, je n’ai pas encore pu réaliser tous les objectifs que je m’étais assignés. Dans le tourbillon de mes multiples activités, je n’ai pas toujours su consacrer le temps nécessaire à l’approfondissement de certains de mes projets. C’est donc une nouvelle étape de ma vie qui se prépare aujourd’hui, une expérience et une maturité qui me poussent à avancer avec plus de profondeur et de constance en ayant redéfini mes priorités. Il en est une, notamment, au plan personnel qui m’occupera bientôt, l’envie de fonder une famille et d’avoir des enfants, même si je suis gâtée aujourd’hui par l’amour de mon neveu et de mes nièces. Une famille nombreuse comme la mienne, ça laisse toujours la place à l’amour dont on a besoin. (rires)»
En parlant d’enfants, de jeunesse polynésienne, il y a tellement de jeunes qui s’interrogent au quotidien, tout comme elle, sur leur devenir, sur leur évolution. Que faire ? Comment le faire ? Selon Hinarere, tes échecs doivent servir à ta réussite de demain. Qui n’a jamais subi d’échec ? Personne ! La perfection n’existe pas. Il faut savoir persévérer, s’investir, rêver, bien s’entourer et parfois tomber pour mieux se relever. Elle souhaiterait tout simplement encourager les « djeunes » dans leurs études et leur projet de vie par un mot : « faaitoito ».
« Quand on voit un enfant heureux et épanoui, on sait qu’il va se lancer des challenges, se donner les moyens de réussir ses études, pousser plus loin ses rêves. L’éducation est primordiale, la stabilité familiale, l’entraide. Nous avons tous besoin à un moment de notre vie d’un coup de pouce, ou d’un coup de pied aux fesses…(rires), c’est pour mieux rebondir ! »
A l’approche de ses 30 ans, c’est une Hinarere rayonnante, confiante et enthousiaste sur son avenir que nous avons rencontrée. Forte de son bilan et de ses expériences, elle est à un tournant de sa vie, pour devenir une femme toujours plus épanouie, une personnalité engagée dans la vie de son pays et une professionnelle confirmée dans son métier, tout en gardant au fond d’elle, l’attachement précieux de tous les Polynésiens et Polynésiennes à son image de Miss Tahiti ; image dont on ne se défait jamais vraiment, quel que soit le temps qui passe… Elle conclut notre entretien par un mot sur la femme polynésienne :
« La femme polynésienne est dans l’air du temps, elle n’a pas perdu son authenticité. Nous sommes fières d’être Polynésiennes, même si les générations se sont métissées : ma maman est Belge, mon papa est un pur Rurutu. Ce n’est pas l’apparence physique qui fait ce que nous sommes, c’est de savoir d’où l’on vient, ce que sont nos racines et notre culture. »
Laurent Lachiver
Rédacteur web
© Photos : Femmes de Polynésie