Sabine, le cœur sur la main
Être autonome et ne pas dépendre des autres est le combat de beaucoup de personnes âgées ou handicapées. Pour les aider dans cette lutte et leur maintenir une vie décente, l’aide à la personne peut être perçue comme un cadeau du ciel. Femmes de Polynésie est parti à la rencontre de Sabine, gérante du centre Matavai.
La baie de Matavai
Bien que née à Papeete, le cœur de Sabine Tekulio appartient à Mahina. Elle grandit dans la maison familiale dans la baie de Matavai. Elle passe ses vacances à Fakarava, d’où son père est originaire. Sa mère, très portée sur la religion, côtoyait régulièrement des personnes âgées. Sabine échange souvent avec elles, et des liens forts se créent.
“J’adorais les écouter parler. Chaque fois qu’ils racontaient une histoire j’arrivais à m’y projeter. Je me disais que je n’étais pas née à la bonne époque.”
Bien plus tard elle tombe amoureuse de Ariipaia Salmon, qui deviendra son mari et père de ses trois enfants, Vaihani, Teraimana et Romano. Ils vivent à Papeete la semaine, pour le côté pratique par rapport au travail et à l’école de tout un chacun des membres de la famille, et passent les weekends dans leur résidence secondaire à Mahina.
Sabine travaille pendant une quinzaine d’années dans la fonction publique communale pour les Tuamotu, sans se douter qu’elle serait amenée à changer de vocation plus tard…
« Ça y est ! Je sais ce que je vais faire ! »
Et puis un jour, une amie lui dit qu’elle souhaiterait ouvrir un centre pour personnes âgées, “et j’ai tout de suite accroché !”. Sabine l’accompagne dans les démarches et propose son aide pour discuter avec les patients, cuisiner, faire du ménage, leurs soins, etc.
“Elle avait ouvert ici, chez moi, car le cadre est idyllique.”
Malheureusement le projet ne dure que six mois, suite à des plaintes du voisinage pour des raisons personnelles. L’amie de Sabine est contrainte de partir.
“Je trouvais ça vraiment dommage car c’était un projet qui me plaisait énormément.”
A trop cogiter sur ce départ et sur l’échec de ce projet, Sabine se lève en pleine nuit en disant à son mari : “Ça y est, je sais ce que je vais faire ! Je vais reprendre l’affaire !”. Celui-ci, pas très convaincu car elle n’a reçu aucune formation, la met en garde sur les risques que son idée implique, mais Sabine est déterminée et relève le challenge.
Une détermination qui porte ses fruits
Le centre Matavai ouvre ses portes, mais ça n’a pas été aussi simple.
“J’ai ouvert une patente et fait toutes mes démarches en toute discrétion, pour anticiper. Il fallait absolument que j’essaye, car cela me tenait à cœur. Si je ne m’étais pas jetée à l’eau, je n’aurais jamais su nager.”
C’est auprès de la CCISM qu’elle se rend pour ouvrir une patente, mais les options qui lui sont proposées, telles que accueillante familiale, ne lui conviennent pas, car elle serait restreinte à n’accueillir que 3 personnes au maximum, alors qu’elle vise plus. Elle opte alors pour une unité de vie, lui permettant d’accueillir 4 à 10 personnes.
“À partir de là, j’ai fait tous les travaux nécessaires dans la maison avec l’aide de mon mari et de mon fils.”
Son centre voit enfin le jour fin 2017 qu’elle bâtit et tient à ce jour avec ses enfants qui participent énormément. Sabine fait appel à la DASS pour être agréée, mais doit remplir quelques conditions avant. Elle s’inscrit au CFPA pour une formation, qu’elle obtient en allant chez le directeur “au culot”.
Elle passe sa formation et ne cesse de remporter les étapes jusqu’à aujourd’hui, où elle est à la tête du Syndicat du service à la personne. Un deuxième centre est sur le point d’ouvrir à Punaauia dans le courant du mois de mars, qui s’intitulera Matahiapo Residence.
“Si je fais ce métier, ce n’est pas pour l’argent. J’aime me sentir utile et je suis très attachée aux personnes âgées dans le besoin. Je ne veux pas qu’elles se sentent seules. Je veux qu’elles se sentent chez elles et qu’elles soient dans un esprit serein.”
Plus d'informations
Facebook : Centre Matavai
Vainui Moreno
Rédactrice Web
©Photos : Lilian Seraut pour Femmes de Polynésie