Heitea Terorotua, doctorante « verte » !
Traverser deux océans pour étudier la Polynésie, c’est peu banal, et pourtant c’est ce qu’a fait Heitea Terorotua. Doctorante à la Rochelle, elle a pris pour sujet d’étude « Les services climatiques côtiers pour l’adaptation au changement climatique en Polynésie française ». Femmes de Polynésie. a rencontré cette enfant du fenua, guidée par son attachement à son île et à ses habitants.
Une réorientation salutaire
Sur le site de l’Université de la Rochelle on peut voir le portrait de cette jeune Polynésienne. Une étudiante qui sait bien que les petites îles tropicales sont vulnérables au changement climatique par leurs caractéristiques biologiques, physiques et socio-économiques. Son cursus ne doit rien au hasard, sauf peut-être lorsqu’elle fait le choix de se réorienter juste après son DUT « Génie thermique et énergie » à Nantes, en optant finalement pour une licence pluridisciplinaire « Environnement Océanien » qui venait de s’ouvrir à l’UPF.
« Avec du recul, je peux dire que cette réorientation m’a été très bénéfique, et que sans elle je ne serais pas où j’en suis aujourd’hui. »
Et aujourd’hui, c’est à La Rochelle que se trouve Heitea, auprès de sa professeure de géographie, Virginie Duvat, membre du GIEC (1) et experte en géomorphologie des îles tropicales. A ses côtés, elle apprend la typologie des îles coralliennes, avec une application à l’atoll de Takapoto. Et pendant son stage de Master 2, elle a pu réaliser une mission à Fakarava et Takaroa, afin d’enquêter auprès des habitants sur l’impact du cyclone Orama de 1983.
« Une très belle expérience ! Il m’aura fallu arriver en Master, et traverser deux océans pour pouvoir étudier la Polynésie ! »
Des valeurs bien ancrées
Heitea s’est donné pour mission de faire de son mieux chaque jour, à son échelle, et avec ses moyens, pour réduire son impact sur la Terre tout en restant optimiste. Elle œuvre en ce sens en mettant en lumière le point de vue des acteurs institutionnels sur le changement climatique, ainsi que leurs besoins en informations scientifiques relatives au climat et en particulier à l’élévation du niveau de la mer.
« Bien sûr, je pense que j’avais déjà la fibre du respect de l’environnement transmise par mes parents. »
Gendarme, le père d’Heitea amène régulièrement toute sa famille à changer de lieu de résidence. Sa mère, quant à elle, exerce à ses yeux le plus beau métier : « elle s’occupait de mes sœurs et moi ». Ils leur transmettent les valeurs de respect de son prochain et des règles de l’environnement.
« Je me souviens encore de m’être fait gronder, la seule fois, quand j’ai jeté mon chewing-gum par la fenêtre de la voiture, parce que j’avais vu une personne le faire. »
L’urgence climatique n’est pas qu’un concept
Le rapport du GIEC 1 a à nouveau souligné l’urgence de mettre en place des politiques d’adaptation au changement climatique. Car si l’on pense que l’on est « à l’abri », « qu’on a de la marge », en comparaison à d’autres territoires insulaires, il parait intelligent pour Heitea de mettre ce « délais » à notre avantage en se préparant dès aujourd’hui avec des mesures drastiques.
« L’humanité ne va pas arrêter les émissions de gaz à effet de serre. L’urgence est de trouver les moyens d’adaptation à l’échelle individuelle et sociétale. Il faut en parler autour de soi, s’informer et informer son voisin. »
A 25 ans, notre jeune doctorante en géographie voit dans la femme de Polynésie une personne positive, souriante, confiante, persévérante, avec une tiare à l’oreille en toutes circonstances.
« Chaque chose arrive pour une raison. Reste ouverte aux opportunités que la vie te donne et sois toujours maîtresse de tes choix. Personne ne te connait mieux que toi, tu es la seule à savoir ce qui est bon pour toi. »
1 Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat
Jeanne Phanariotis
Rédactrice web
© Photos : Heitea Terorotua