Caroline Bouges et Fanny Tesson : pour un commerce plus éthique
Les initiatives écologiques fleurissent au fenua. Lutter contre le gaspillage et la surconsommation, tel est le combat de Caroline Bouges et Fanny Tesson. Elles ont ainsi lancé leur épicerie ambulante sans emballages à Moorea. Pour Femmes de Polynésie, Caroline et Fanny racontent leurs parcours.
La rencontre du duo
Fanny Tesson quitte la France en 2008 pour les îles. Son amour pour la vie insulaire l’a conduite à s’installer à Moorea où elle exerce le métier de pharmacienne depuis maintenant 8 ans. C’est lors d’une visite à une amie commune qu’elle fait la connaissance de Caroline Bouges.
« Caro est venue en vacances plusieurs fois. Elle m’a aidée à faire les finitions de ma maison car elle fait de la menuiserie… On a vraiment une amitié super forte et on est hyper complémentaires. »
Depuis un an et demi, Caroline a elle aussi laissé la métropole pour Moorea.
Pour les deux trentenaires, le respect de la planète est devenu un mode de vie. Caroline explique :
« Depuis une dizaine d’années, on a changé nos habitudes quotidiennes par rapport à notre consommation. On a senti qu’on avait envie de faire un peu plus, de passer à l’action, d’essayer de sensibiliser plus de monde. »
Fanny précise :
« On ne mange plus de viande, on fait notre compost, nos produits ménagers, je fais mon fa’a’apu… On a beaucoup réduit toutes les deux nos transports aériens. On était chacune de grandes voyageuses. Depuis quelques années, on voyage beaucoup moins. »
La naissance d’un projet
Partir de Moorea pour faire leurs courses à Tahiti leur a permis de constater l’absence d’épicerie de vente en vrac sur l’île sœur.
« Ça me manquait. Ça fait vraiment partie des choses que je trouve facile à changer au quotidien », déplore Fanny.
Caroline n’avait pas de projet professionnel défini, alors les deux amies se sont lancées.
« Il y avait le côté sympa de se dire que Caroline pouvait faire la menuiserie, construire l’épicerie à notre image. »
Le travail en équipe ne leur fait pas peur.
« On va vraiment dans le même sens, on est tout le temps d’accord, ça se passe très bien ! »
Ainsi, début 2020, le projet du « Ma’a dans le bocal » s’immisce dans leurs vies.
« Le confinement nous a montré l’importance de consommer local et de valoriser les ressources du fenua. », constate Caroline.
Au-delà d’une belle amitié, le « Ma’a dans le bocal » est en partie une affaire de famille. Un moyen d’inscrire l’identité culturelle tahitienne au travers de choix visuels colorés, tant sur leur roulotte que sur leurs produits. Fanny explique fièrement :
« Mon petit frère qui est graphiste en France s’est pas mal penché sur la culture polynésienne et il a sorti ce logo.»
Un tiki qui représente pour elles le lien social qu’elles s’appliquent à construire avec leur clientèle.
Le concept du "Ma’a dans le bocal"
Pour Fanny et Caroline, réduire l’impact de l’Homme sur l’environnement consiste entre autre à faire attention à ce qu’on achète, valoriser le troc, la réutilisation. Depuis le mois de décembre, elles sillonnent Moorea dans leur camionnette en proposant des produits alimentaires ou non, vendus au poids.
« Ça évite les emballages et aussi le gaspillage alimentaire puisqu’on ne prend que ce qui nous est nécessaire.» détaille Caroline.
Les clients emportent leurs achats dans des bocaux en verre ou des sacs réutilisables.
« Notre message est assez fort. La Polynésie est constituée d’îles, et la gestion des déchets est un problème important en milieu insulaire. »
En changeant de spot tous les jours, elles facilitent l’accès à leur commerce aux habitants qui économisent leur carburant et diminuent leur empreinte carbone.
« Ça permet d’avoir une visibilité sur plusieurs points de l’île mais ça évite aussi tous les déplacements individuels. »
Un nouveau mode de vie que les deux amies transmettent aussi aux plus jeunes. Récemment elles sont intervenues auprès des élèves du lycée agricole d’Opunohu pour les sensibiliser à une alimentation plus responsable.
L’envie d’aller plus loin
Créer un lien social a toujours été une source de motivation. Adeptes des réseaux, les deux femmes se sont constituées une communauté avant le lancement de leur épicerie. Avec le temps, Caroline et Fanny souhaitent diversifier les produits qu’elles commercialisent avec de nouveaux partenaires du territoire.
« On est toujours à la recherche de producteurs locaux pour par exemple des fruits séchés, des conserves, des confitures… »
Elles aimeraient également élargir leur activité avec des ateliers à thèmes qui permettraient d‘apprendre à fabriquer des produits soi-même.
« Nous avons créé un réseau de jeunes entrepreneurs sur Moorea. On va essayer de travailler ensemble. »
Isabelle PIBOULEAU
Rédactrice Web
©Photos : Isabelle PIBOULEAU pour Femmes de Polynésie