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Culture

Yvonne Bellais : une vie consacrée au tīfaifai

Publié le 29 avril 2025

Un pied à Tahiti, l’autre dans les îles, Yvonne Bellais semble toujours en mouvement. Celle que l’on surnomme « Mamie Yvonne » s’est fait depuis longtemps un nom dans l’art du tīfaifai et continue, à 78 ans passés, d’œuvrer sans relâche pour sa diffusion. Elle revient sur son parcours et partage ses réflexions avec Femmes de Polynésie.

La soif d'apprendre

Née dans une famille nombreuse, Yvonne Bellais grandit entre Tahiti et les Tuamotu. Adolescente, elle s’oriente vers le cours ménager du collège Anne-Marie Javouhey. Elle y développe une grande curiosité et ancre en elle l’envie constante de progresser.

« On apprenait la couture, la cuisine, la puériculture. Par la suite, j’ai été infirmière pendant un an dans les îles. J’ai cousu des robes de mariée et donné des cours de couture à l’école de Paofai, puis à Faa’a. J’ai fait un peu de tout : j’ai même appris la coiffure et la manucure avec ma sœur ! J’aime apprendre. Même si tu es dans la vallée et qu’il n’y a personne, tu peux apprendre. »

La passion du tīfaifai

Le tīfaifai a toujours eu une place privilégiée dans sa famille. Sa mère cousait, les femmes de la famille aussi. Une tante lui suggère de commencer dès l’âge de 15 ans, mais Yvonne met du temps à apprécier l’expérience.

« Ma tante m’a aidée à bâtir mon premier tīfaifai. Comme ça me prenait beaucoup de temps, j’ai eu l’idée de le confier à une amie, en lui proposant de la payer pour le terminer. Elle l’a avancé, mais me l’a rendu un mois plus tard, en me disant de le finir seule. Ce premier tīfaifai représente beaucoup pour moi et m’accompagne partout. Ma tante et mon amie ont travaillé dessus, moi aussi. Je l’ai cousu à la main et à la machine. »

Yvonne Bellais, artisane couturière de Polynésie française spécialisée dans l'art du tifaifai

 

Yvonne apprend l’exigence de cet art qui nécessite patience et persévérance. Elle prend aussi conscience de sa grande valeur. Pourtant, elle ne se remettra seule à l’ouvrage que 20 ans plus tard.

« Cette fois-ci, j’entre dedans. Ma cousine me prête son joli patron de roses pour que je fasse un tīfaifai pour mon fils aux couleurs de Teahupo’o. Dans la foulée, je participe à mon premier concours sur le thème du soleil. J’ose présenter au jury un arc-en-ciel, qui évoque pour moi le beau temps. Je n’ai peur de rien ! »

L'exigence des concours

Dans le cadre du Heiva, Yvonne Bellais enchaîne les concours d’artisanat traditionnel qui se déroulent durant une journée entière. Providentiellement, elle réalise le premier bâti de tīfaifai à main levée, que connaissent bien les créatrices d’aujourd’hui.

« Cela arrive par accident. L’amie, chargée de dessiner le patron chez elle, oublie de le faire. Comme je dessine beaucoup, j’improvise en traçant directement le motif sur le tissu. La présidente du jury m’observe et vient me dire à la pause : “Je vais demander au comité d’ajouter la prochaine fois cette nouvelle catégorie au concours”. Depuis, on peut créer son modèle sur place. Le tracé peut être fini en 15 minutes, mais il faut savoir par où le commencer. »

Yvonne Bellais, artisane couturière de Polynésie française spécialisée dans l'art du tifaifai

La nature comme source d'inspiration

Passionnée par la nature, Yvonne Bellais y puise son inspiration pour ses créations. Dès son plus jeune âge, sa mère lui apprend à reconnaître les plantes et à les utiliser pour soigner ses maux.

«La nature t’apprend plein de choses. Pour créer un beau motif, il faut savoir la connaître, l’observer et chercher des informations. Cette année, le thème de l’exposition porte sur les baleines. Dans l’histoire polynésienne, on a des totems, et les baleines font partie de ceux de notre famille. Je lis leur histoire pour m’en imprégner. Grâce à des livres de la bibliothèque, j’ai même découvert qu’un arbre, le Pu’atea, donne des fleurs quand elles arrivent. »

Yvonne Bellais, artisane couturière de Polynésie française spécialisée dans l'art du tifaifai

Un lieu de rencontre et de transmission

En 1987, Yvonne intègre le village des artisans à Tipaerui pour partager son savoir-faire et promouvoir l’art du tīfaifai. Lors de manifestations, elle rencontre notamment le roi du Tonga et un secrétaire d’état pour les artisans. Aujourd’hui encore, avec l’association Te ‘āpī nui o te tīfaifai, cette créatrice de quelque 600 motifs se déplace régulièrement dans les îles pour former les artisans du fenua.

« Une partie de moi voyage. J’ai conçu un tīfaifai pour un mariage en Israël avec les couleurs du drapeau. Un autre est parti au Japon. Un jour, quand j’ai posé pour la photo de famille des artisans, on m’a demandé pourquoi ma peau était blanche, alors que j’étais d’origine pa’umotu. J’ai répondu qu’entre mille nacres qui donnent des perles, il se peut qu’on trouve une perle blanche. Cette perle blanche, c’est moi ! J’ai tout étudié sur ma famille. Si tu connais ton passé, tu connais ton avenir !  »

Yvonne Bellais, artisane couturière de Polynésie française spécialisée dans l'art du tifaifai
Yvonne Bellais, artisane couturière de Polynésie française spécialisée dans l'art du tifaifai

Laetitia d’Hérouville

Rédactrice

©Photos : Laetitia d’Hérouville pour Femmes de Polynésie

Directeur des Publications : Yvon Bardes

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AGENDA

Du 28 avril au 4 mai, l’association Te ‘āpī nui o te tīfaifai, présidée par Mme Béatrice Legayic, organise la 24e édition du salon du tīfaifai de 8h à 18h dans le hall de l’Assemblée de la Polynésie française.

La prochaine formation de l’association  Te ‘āpī nui o te tīfaifai aura lieu aux Marquises en octobre 2025.

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