Tetahei Myrtille Bodin, tradipraticienne : la nature est un vrai trésor pour notre bien-être
Tetahei Myrtille Bodin vit dans un jardin verdoyant de Papeete, une oasis improbable au creux de l’agitation urbaine. Elle reçoit de nombreuses personnes venues bénéficier de son savoir et des remèdes traditionnels. Femmes de Polynésie a rencontré cette femme engagée à l’origine de la page Facebook AROMAOHI – Santé Bien-Être, dont la philosophie est : « notre pharmacie, notre parfumerie se trouvent dans notre jardin : La Nature est un vrai trésor pour notre bien-être ».
Une enfance de reine bercée par sa « Mama’u » ou Arumarii
Tetahei a été élevée par Arumarii1, une femme détentrice de nombreux savoirs traditionnels et qu’elle considère comme sa grand-mère.
« Je n’ai su qu’à l’adolescence, qu’elle n’était pas ma grand-mère biologique mais la sœur de mon arrière-grand père Moiho, époux de Rarani, petite-fille de la Reine Heimata’ura TAMATOA TAMAEVA V, reine de Rimatara. »
Arumarii lui a appris tout ce qu’elle sait aujourd’hui.
« Elle m’a laissé un héritage fantastique. Elle nous a appris à reconnaître les plantes médicinales, comment les couper, quand les prendre… On la regardait les broyer avec son penu2 et préparer des remèdes traditionnels. »
Elle raconte qu’un de leurs rituels quotidiens était le ramassage de feuilles du jardin pour préparer la tisane du soir.
« Ils avaient tout compris nos anciens. Ils savaient qu’il fallait boire le soir ce breuvage salvateur pour faciliter la digestion afin d’aider ton organisme à bien dormir. »
Grâce à ces enseignements précieux, Tetahei reçoit de nombreux savoirs aujourd’hui méconnus et se passionne pour le raau3 Tahiti.
Le rituel sacré du Tāhe’e
Tetahei aborde un regard profond sur son visage décidé et souriant. Son jardin paisible est animé par un flot de visiteurs venus chercher un paquet étrange constitué de bouteilles colorées. Avec bienveillance, elle explique le rituel à suivre basé sur le savoir des anciens et sur des formations qu’elle a suivies.
« Au moment de la nouvelle lune, les flux et reflux, comme les marées sont plus puissants de 40%, c’est scientifiquement prouvé. Nos tupuna4 l’avaient compris, c’est pour ça qu’ils faisaient ce rituel pour nourrir leur corps et le nettoyer. »
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Tetahei prône un jeûne thérapeutique simple basé sur la consommation de jus traditionnels et de l’eau au moment le plus favorable du mois, là où notre corps est connecté avec le ciel… l’univers. Chacun de ceux qui viennent accomplir ce rituel du Tāhe’e5 au « avae api » ou nouvelle lune, reçoit un guide explicatif de la marche à suivre sur un, trois ou cinq jours selon le choix de la personne.
« Le Tāhe’e, c’est le « détox » de la nouvelle lune ! C’est un rituel incontournable qu’on devrait tous suivre. »
Le cadeau de nos tupuna
La famille de Tetahei vient des Australes. Tous les membres de sa famille portent des noms en hommage à leur culture et leur lignée comme « Rarani » qui signifie le plus grand des soleils, Rahiri « paré de lumière ou roi soleil » ou « Hiava » en hommage à la passe de Rimatara devant laquelle se trouve la tombe de sa lignée royale. Elle se remémore les souvenirs de son enfance en pensant à ses ancêtres.
« Toute leur vie était dirigée par la lune. Il y avait un calendrier pour la pêche, pour le potager, un calendrier pour les voyages et même un calendrier pour les rituels de purification. »
Pour Tetahei, être coupé de notre corps est dévastateur.
« Quand je vois aujourd’hui les Polynésiens, j’ai envie de les secouer. Je prends pour exemple leur voiture : ils savent bien que pour que celle-ci marche bien, ils doivent effectuer régulièrement une vidange afin que le moteur fonctionne au mieux. Nous possédons dix moteurs qui sont les divers appareils de notre corps (appareil digestif, respiratoire, musculaire, osseux, etc.). Tout comme nous entretenons notre voiture, commençons donc par nous occuper du conducteur que nous sommes ! »
Engagée, franche et fière de ses racines, c’est au cœur de son jardin apaisant que Tetahei se bat pour une cause qui la transporte, celle de renouer avec notre identité polynésienne et nos savoirs ancestraux : « a tahee anae e ia vai maohi, te ea ! 6 »
Plus d’informations
Sur la page Facebook Aromaohi, Santé – Bien-être
1 Arumarii : signifie bercée royale.
2 Penu : pillon.
3 Raau : plantes médicinales polynésiennes et remèdes tahitiens.
4 Tupuna : les ancêtres.
5 Tāhe’e : fait de purger quelqu’un, son corps.
6 « Préservons notre santé, purifions-nous par notre médecine traditionnelle. »
Céline Hervé Bazin
Rédactrice web
© Photos : Céline Hervé Bazin, Aromaohi
