Rose, préserver son île à tout prix
Rose tient une pension à Maupiti avec son mari Phirmin. Ils ont restauré un marae1 et se battent pour qu’il soit reconnu comme lieu historique de la commune. Très attachés à leur culture, ils reçoivent de nombreux visiteurs dans leur havre de paix où ils sensibilisent à l’histoire de leur commune et sa préservation.
L’amour de la culture de Maupiti
Rose et Phirmin partagent le même amour pour leur île dont ils connaissent toutes les légendes, son histoire et son caractère sacré. Fervents partisans de la préservation de leur terre, l’eau est pour eux, une ressource très précieuse qui joue un rôle essentiel au quotidien et aussi, dans l’histoire de Maupiti. Phirmin aime particulièrement raconter l’histoire des différents noms de l’île avant qu’elle ne devienne « Maupiti ». Depuis toujours, les mots ont signifié « l’unité » ou « tenir à deux. » De l’époque des sages, des guerriers à celle des rois et des missionnaires, il y a toujours eu la philosophie du partage ancrée dans la culture de Maupiti. Rose ajoute que cet héritage a transmis « des significations aux lieux où la communauté pouvait se rejoindre ». Près de chez eux, par exemple, se trouve la demeure de Orovaru, le dieu de la fécondité… C’est aussi l’endroit le plus protégé de l’île, où l’eau est de meilleure qualité.
« L’eau, c’est de l’or »
L’eau justement, elle est inscrite dans la légende de Maupiti et dans le patrimoine de l’île. Pour Phirmin, « l’eau c’est le sacré » et pour Rose, « c’est de l’or. Les anciens avaient conscience que l’eau était précieuse car il fallait creuser, chercher l’eau et conserver l’eau une fois chez soi. Aujourd’hui, avec les facilités techniques, il y a du gaspillage. » Pour le couple, tout se passe dans la tête. Pour Phirmin, « l’eau, c’est un usage à réfléchir, à poser, à anticiper… C’est en sensibilisant que l’on pourra mieux la gérer. » Rose sourit aux propos de son mari. Elle est plus radicale.
« Il faut fermer l’eau. Tu sais une fois, l’eau des fontaines a été coupée et ça était la panique générale. Les gens ont dû retourner au vieux puits, ils ont marché plus longtemps, ils ont dû faire la queue… Couper l’eau, c’est un moyen radical pour faire réfléchir et faire comprendre que sans accès à l’eau, tout est plus dur et plus difficile. »
Phirmin adopte un air qui exprime son doute puis s’amuse de voir sa femme si décidée.
« Ce serait peut-être ça la solution, le message à faire passer… Quelle est ta valeur de l’eau ? »
Pour lui, il faut faire réfléchir aux solutions, la plupart s’apercevront que ce n’est pas si simple et feront plus attention. « Cela permettrait de mieux répartir l’eau en fonction des besoins de chacun. » Phirmin se montre assez convaincu par le partage équitable de l’eau. Son rêve, ce serait de pouvoir acheter une énorme citerne d’eau et la distribuer à ceux qui n’en ont pas ou qui ne peuvent pas se la payer. Rose est plus pragmatique. Elle voudrait tout simplement un robinet d’eau à boire dans chaque maison… « Seulement pour boire, pour que tout le monde soit en bonne santé et puisse avoir de quoi vivre. » Pour le reste, c’est de l’usage et chacun doit apprendre à gérer.
Protéger le marae de Maupiti
Ces deux passionnés sont les protecteurs du marae de leur île qui porte selon eux, toutes les traces des légendes de Maupiti. Chaque rocher a sa signification. Sous un grand arbre, intarissables telle l’eau qui chantonne près d’eux, ils racontent encore, d’autres anecdotes, d’autres récits sur leur culture. Plus loin, une source d’eau douce coule dans l’eau de mer, elle servait à purifier les Rois avant leur intronisation, elle symbolise l’union essentielle des éléments naturels. Avec eux, les histoires d’eau se mélangent subtilement à leur cause commune : la préservation de leur île.
1Marae : Plate-forme construite en pierres sèches et où se déroulait le culte ancien, associé souvent à des cérémonies à caractère social ou politique. (Source : Dictionnaire tahitien en ligne)
Céline Hervé Bazin
Rédactrice web
© Photo de couverture : Céline Hervé Bazin