Mélodie Delabarre
Dès qu’elle chante et que l’on entend sa voix, on a l’oreille attirée par ce timbre particulier. Encore peu connue au fenua, Mélodie Delabarre sait s’entourer et pourrait bien arriver au devant de la scène musicale polynésienne dans très peu de temps. Elle se confie à Femmes de Polynésie
La maman de Mélodie était enceinte d’elle en Guadeloupe et a donné naissance à sa fille à Bordeaux. Peut-être reste-t-il aujourd’hui quelque chose chez Mélodie de ce séjour dans les îles, où elle a fait plusieurs allers-retours. Elle reconnait tout de suite une attirance pour les tropiques.
UN REPORTAGE SUR TAHITI A L’AGE DE 4 ANS
Mélodie se souvient qu’elle avait quatre ans, lorsqu’un jour elle regarde à la télévision un reportage sur Tahiti. Instantanément, la petite fille se dit que c’est là, et nulle part ailleurs, qu’elle veut vivre quand elle sera grande.
« J’ai été époustouflée par des images sublimes de lagons cristallins et de plages de sable blanc, sans doute Bora Bora ou les Tuamotu ».
Aujourd’hui, elle a bien saisi la différence d’ambiance et de mentalité entre les Antilles, plus impulsives, et la Polynésie, où il y a un vrai mana, où il y a plus de tolérance. Aux Antilles, elle a été victime de racisme, car, dit-elle :
« Si tu viens en Guadeloupe en tant que touriste, ça va… si tu viens pour travailler ou t’installer, c’est déjà très différent. Au collège, où j’étais à Sainte Anne, on avait trois camions de CRS qui nous protégeaient, un portique de sécurité à l’entrée… J’étais en mode survie tous les jours ».
Et sa présence aujourd’hui en Polynésie, elle le doit justement à la douceur de vivre de nos îles. Et puis surtout… Mélodie n’aime pas le froid !
REPRENDRE L’EXPLOITATION D’UNE FERME EN DORDOGNE
En Métropole, où elle a de la famille vers Bordeaux, Mélodie a eu plusieurs expériences professionnelles dont celle d’éducatrice canin et de danseuse. Elle a vécu en Dordogne où elle était en reconversion professionnelle pour reprendre une ferme avec son conjoint. Elle est retournée au lycée agricole pour cela. Tandis que son tane passait un BPREA pour devenir responsable d’une exploitation agricole ; Mélodie a passé un BP Horticulture pour devenir maraîchère.
« Au dernier moment le propriétaire à qui on devait racheter la ferme, a changé d’avis et nous nous sommes retrouvés dehors.»
Face à cet échec inattendu, Mélodie y a vu comme un signe, et a reformulé l’idée qui la taraudait depuis longtemps de tout plaquer et de repartir à Tahiti. Comme seule certitude en arrivant ici il y a deux ans, le fait que son conjoint aurait un travail ; mais sinon, elle ne connaissait absolument personne.
« Très vite, la musique est revenue dans ma vie. Mes amis colocataires m’emmenaient dans des soirées jam et m’incitaient à chanter ».
De fil en aiguille, elle est repérée par un guitariste nommé Antoine (dit « Pouet Pouet »), avec qui elle collabore toujours, et elle s’inscrit au concours de Polynésie 1ère « zik truck ». Elle réunit un maximum de votes sur Moorea, où elle est installée, et vient faire la finale à Tahiti. Elle avait entendu la pub pour l’évènement à la radio et s’était dit pourquoi pas ?
Même si elle n’est pas fan des concours, elle termine dans les 6 finalistes, mais ne passe pas le troisième tour.
A cette occasion, elle rencontre d’abord Vaheana Fernandez (1) qui l’incite à exploiter sa voix qui sort de l’ordinaire. Elle fait ensuite la connaissance de Aranud (2). Ces deux artistes craquant pour elle ; ils deviennent producteurs de Mélodie et la prennent en main, l’emmenant aussi au studio de Heremoana Ebb.
« Je propose une première maquette, réalisée en collaboration avec le DJ Ben Carter ».
Car Mélodie écrit les paroles de ses chansons. Et pour sa première maquette, elle collabore avec DJ Ben Carter, qui a déjà travaillé en métropole avec Sheryfa Luna et qui lui compose la musique. Ben étant un ami d’enfance de Mélodie qui avait pensé à elle pour l’une de ses musiques qu’il gardait en réserve. Du coup, elle envoie cette maquette avec le titre « Gimmie the Riddim », à Vaheana et à Ben. Un morceau reggae qui a tous les ingrédients pour devenir un tube.
« Mon idole number one, mon mentor… c’est Bob Marley. Mais, je suis aussi des chanteuses comme Tracy Chapman ou Lauryn Hill ».
Et d’ailleurs, quand on écoute Mélodie pour la première fois, on pense assez vite à la voix de Tracy Chapman. Pour elle, le reggae c’est une philosophie spirituelle qui permet d’œuvrer pour le bien, une musique positive et pacifique.
LA MUSIQUE COMME MODE D’EXPRESSION VITALE
Après une période de plusieurs années de silence, un accouchement difficile à haut risque et beaucoup d’isolement ; Mélodie pense que rien n’arrive par hasard, et que si elle en est là aujourd’hui, c’est qu’il y a un sens profond à tout cela.
« Après toutes ces épreuves personnelles difficiles, j’ai compris que j’avais une mission dans la vie, et que, par la musique, je serai un messager. Je travaille pour l’univers, je travaille pour l’unité, pour la paix dans le monde. Je veux me servir de ma voix pour ça, et mon but c’est que chacune de mes compositions deviennent une prise de conscience ».
A côté de sa passion pour la musique, Mélodie s’occupe de la gestion d’un fare en location sur la plage des Tipaniers à Moorea, ce qui lui laisse pas mal de temps libre pour des répétitions et des prestations comme ces jours-ci au Hilton avec son guitariste Antoine.
Un clip de la série « Studio Live » de Polynésie 1ère (une reprise reggae de la chanteuse Etana) a été mis en ligne il y a quelques jours, et a dépassé les 30.000 vues en un temps record, car Mélodie est extrêmement convaincante quand elle chante, et talentueuse. Résultat, les partages sur les réseaux sociaux s’enchaînent.
Localement, Mélodie apprécie Te Ava Piti, Pepena et Vaiteani. Dans ses prochaines compositions, elle incorporera des thèmes et des paroles en tahitien.
« J’ai envie d’échanger avec le public. C’est cette énergie, le fait de donner et de recevoir qui me motive, le fait de me dépasser aussi car j’ai une nature timide, pour acquérir une présence scénique »
Mélodie revendique un côté ermite, le fait d’avoir voulu s’isoler dans une ferme, et d’être aujourd’hui un peu retirée à Moorea, loin du tumulte de la ville. Ainsi elle se préserve et elle veut rester humble.
UN CLIP EN PREPARATION
Mélodie va faire en Mars son premier clip, sous la direction de Manuarii Bonnefin, qui sera tourné à Moorea, à découvrir bientôt sur les réseaux sociaux et à la télévision. Mélodie est une artiste que beaucoup découvriront dans les semaines et les mois qui viennent, et que l’on n’oublie pas. D’ailleurs, toutes les fées qui se penchent sur son berceau de jeune artiste ne s’y sont pas trompées.
(1) Voir portrait dans Femmes de Polynésie : Vaheana Fernandez
(2) Voir portrait dans Hommes de Polynésie : Aranud
Laurent Lachiver
Rédacteur web
© Photos : Laurent Lachiver et Polynésie 1ère sources – studio live session