
De Takapoto aux expos dans le monde, Moeata Tahiri voyage au pays des coquillages
Femmes de Polynésie vous fait découvrir aujourd’hui le parcours de Moeata Tahiri. C’est après un voyage sur l’atoll de Takapoto, aux Tuamotu, qu’elle décide de se reconvertir dans l’artisanat des coquillages à la quarantaine passée. Aujourd’hui, l’artisane est reconnue pour son savoir-faire dans l’art des coquillages.
Une grand-mère artisane
Avec minutie, Moeata Tahiri perce un coquillage puis recommence, faisant attention à chacun de ses gestes pour ne pas briser les petits cônes.
« J’aime faire ça, cela me détend et j’aime aussi l’idée de créer des objets avec mes mains. »
Âgée de 54 ans, Moeata Tahiri a décidé de se consacrer à l’artisanat sur le tard, il y a environ une petite quinzaine d’années. Pourtant, c’est toute jeune qu’elle a fait connaissance avec cette pratique.
« Je suis née à Tahiti, ma grand-mère vivait avec nous, elle avait quitté son île de Takapoto. Elle était artisane et fabriquait les colliers pour les māmā de l’aéroport. Quand j’étais enfant, je la regardais faire et je me souviens qu’on allait livrer les māmā. »

Des études au lycée hôtelier
Si enfant Moeata Tahiri observe sa grand-mère confectionner les colliers, elle opte plus tard pour une toute autre voie.
« J’ai suivi un bac hôtellerie-restauration au lycée hôtelier, qui était alors au Taaone, puis j’ai passé quelques mois à l’Université en reo tahiti. Je voulais enseigner, j’étais plutôt bonne élève, mais je n’ai pas pu continuer pour des raisons familiales. »
Coup de cœur pour Takapoto
Un voyage bouleverse la vie de la jeune fille d’alors.
« Ma grand-mère nous a emmenées avec ma sœur pour nous faire découvrir son atoll de Takapoto. J’ai eu un vrai coup de cœur pour ce lieu, c’était magnifique, j’ai aimé tout de suite la douceur de vivre, l’ambiance hors du temps. »

Quelques années plus tard, sa grand-mère disparaît, mais l’attachement pour l’atoll reste intact.
Déménagement
Moeata Tahiri y retourne régulièrement, jusqu’au jour où l’amour s’invite.
« Je suis tombée amoureuse et je me suis mariée. Je me suis installée là-bas. Mon ex-mari tenait l’épicerie du village. On a eu un garçon. Je faisais alors beaucoup de pâtisseries pour le magasin. »
Mais au fond d’elle, Moeata Tahiri sent qu’une autre voie l’attend.
La révélation
C’est en 2008, lors d’un voyage à Rapa Nui pour le festival Tapati1, que le déclic arrive. À la demande de son amie qui l’invite, elle ramène dans ses bagages quelques coquillages des Tuamotu. Le succès est immédiat.
« Les habitants de l’île de Pâques en raffolaient ! J’y suis retournée une seconde fois, toujours avec des coquillages, et ça a eu le même succès. »

Moeata Tahiri comprend alors que ce trésor naturel et marin est une richesse à partager et à mettre en valeur.
L’apprentissage auprès des mamies
À la quarantaine, elle décide de se former à l’artisanat. Aux côtés de “Mamie Louise” et “Mamie Marie”, Moeata apprend patiemment les gestes : aller chercher les coquillages en mer, les préparer, les nettoyer, les faire sécher. Puis vient le travail de la création : percer, assembler, donner vie à des assiettes, des miroirs, des bijoux, des pots ou encore des chapeaux. Aujourd’hui, Moeata ne compte plus les heures passées à créer.
« Le plus important, c’est la base. Si elle est solide, le reste de l’objet suit. »
De nombreux voyages
En quelques années, Moeata embrasse complètement le métier d’artisane. Elle participe à des expositions, des salons, mais pas seulement locaux… L’artisanat lui donne aussi l’occasion de beaucoup voyager à travers le monde, que ce soit au Japon, en passant par la France, Hawaii, ou encore la Nouvelle-Zélande…
Mais quel que soit le lieu, que ce soit en Polynésie ou ailleurs, Moeata est toujours motivée par la même passion.

« Derrière chaque objet se cache une histoire : celle des coquillages. J’aime raconter aux clients comment on va chercher les coquillages sur la plage, d’où ils viennent, comment on fabrique les objets. »
Un engagement pour les autres
Et si cette relation avec les clients est primordiale pour Moeata, une autre passion l’anime également, celle de transmettre l’artisanat local.
« Je participe à beaucoup d’ateliers de formation sur les atolls avec le Service de l’artisanat traditionnel. C’est important de préserver ce savoir-faire pour les jeunes générations, comme les māmā ou ma grand-mère ont pu le faire. »
1 Le festival Tapati est le grand festival culturel de l’Île de Pâques. Il se déroule début février pendant une dizaine de jours.
Rédactrice
©Photos & Vidéos : Pauline Stasi pour Femmes de Polynésie
Directeur des Publications : Yvon BARDES



