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Société

Silence, on rosse… La main tendue de Marie-Noëlle pour se relever

Publié le 6 avril 2020

En cette période de crise sanitaire, le confinement imposé et la constante promiscuité qu’il engendre, exposent plus que jamais une partie de la population à la violence. Cette situation de privation de liberté inédite, qui est déjà une épreuve pour beaucoup, se révèle être un véritable enfer pour d’autres. Femmes de Polynésie est allée à la rencontre d’une femme d’exception, Marie-Noëlle EPETAHUI, présidente de l’association « Vahine Orama Tahiti Iti » qui vient en aide aux victimes de violence conjugale à Tahiti.

Victime de violence familiale, elle fait le choix de la vie

C’est à Afaahiti, dans une famille d’agriculteurs démunie que Marie-Noëlle voit le jour le 27 décembre 1959. Avec ses 5 frères et sœurs, elle travaille très jeune dans les plantations familiales, sans pouvoir aller à l’école, trop chère pour eux.

« Il y avait des violences dans ma famille. Je cherchais le pourquoi de ces disputes. Pourquoi se faire du mal entre frères et sœurs, entre parents ? »

Très jeune, Marie-Noëlle comprend qu’elle a un choix à faire pour survivre. Elle oriente alors ses pensées vers les émotions de joie qu’elle ressent au contact de la nature.

« J’ai tellement souffert, j’ai été très brisée. À 10 ans, tu sais, quand tu as une vie très dure, ton cœur s’affaiblit. Alors j’ai choisi d’attraper le bonheur où je pouvais. Et c’est dans la beauté de la nature que j’ai puisé mon énergie. »

À 18 ans, Marie-Noëlle devient serveuse. À 20 ans, elle est maman pour la première fois. Suivront par la suite quatre autres enfants. Très polyvalente, elle sera femme de ménage, fera de la mécanique et de la maçonnerie.

« Je suis quelqu’un qui a beaucoup d’amour dans le cœur. Beaucoup de souffrance aussi. Mais au final, c’est l’amour qui comble ma souffrance. »

Une façon singulière de voir les choses

« C’est depuis l’âge de 20 ans que ça a été créé dans mon cœur, ce désir d’aider les gens. »

Marie-Noëlle cherche avant tout à combler le besoin d’attention et de considération de ces femmes qui ont été dévalorisées, piétinées, frappées, abusées. Pour cela, elle leur offre un merveilleux cadeau : une écoute attentive, authentique, de qualité. Une écoute empathique et bienveillante.

« Les gens disent : « appelle Marie-Noëlle, elle écoute très bien. » Tu sais, je ne juge pas les gens. Drogue, alcool, maîtresses, amants, le beau-fils qui frappe la belle-mère… Je ne leur fais pas la morale, il n’y a pas besoin de rajouter plus de souffrance. »

Au lieu de s’acharner sur les défauts des gens, Marie-Noëlle choisit d’orienter son esprit vers leur potentiel positif. Après les avoir longuement écoutées, elle leur parle de son vécu et comment elle s’en est relevée. Elle leur parle aussi de sa relation à Dieu, et leur explique leurs droits en les orientant vers l’association Te Rama Ora.

« Ça peut durer des heures pour pouvoir redonner la tête haute à une femme violentée. Je leur dis : Tu sais ma chérie, tu ne veux entendre aucune voix. Il y a la voix de la haine, mais quelque chose qui est là aussi, c’est la voix de l’amour, de la vie. C’est à toi de choisir. »

Une victoire lorsque les femmes qui viennent la voir ou qui la contactent retrouvent leur sourire et leur dignité.

 « Je suis heureuse de jour en jour malgré ma fatigue. Quand je regarde dehors la rosée du matin, je suis heureuse. Je vois toujours la vie comme ça, il y a toujours de la beauté. Mon mari, il est cool. Je l’ai trouvé dans la rosée du matin. »

Son dévouement pour l’association

Depuis 2010, Marie-Noëlle se consacre aux femmes en difficulté en créant l’association Vahine Orama Tahiti Iti, via la fédération Vahine Orama. Actuellement présidente, son bureau est constitué de trois femmes et 4 intervenants qui collaborent avec 44 adhérents constitués de professionnels (médecins, infirmières, gendarmerie, pompiers, enseignants…)

« Protéger la femme violentée, pour qu’elle prenne une distance avec l’auteur des faits est très important. L’assistante sociale n’est pas là tout de suite. Alors à 1h du matin, quand la victime se retrouve seule avec le gendarme, c’est le système D : je l’accueille chez moi le temps de la crise. »

Mais, ce n’est pas possible en ce moment car chacun reste chez soi pendant la crise sanitaire liée au coronavirus. Impuissante, Marie-Noëlle attend la fin de la période d’isolement pour revenir sur le terrain et tendre à nouveau ses bras aux femmes en souffrance.

Entre janvier et février 2020, 65 personnes ont contacté l’association Vahine Orama Tahiti Iti. Victimes collatérales du confinement, les femmes battues, cloîtrées chez elles, vivent l’enfer d’une prison et n’ont bien souvent aucune possibilité d’appeler. Aux femmes de Polynésie, Marie-Noëlle, disponible par téléphone, souhaite faire passer ce message :

« A toutes les femmes, protégez votre corps. Votre corps vous appartient, il faut savoir dire non. Soyez belles et prenez soin de vous. »

Plus d'informations

Permanence dans les locaux de la mairie de Taiarapu Est : ouvert de 7h30 à 15h30 du lundi au Jeudi et le vendredi de 7h30 à 14h30, pour écouter, orienter et agir s’il le faut, toute personne en difficulté (hommes, femmes, enfants de tous âges).

Tehina De La Motte

 Rédactrice Web

 ©Photos : Marie-Noëlle Epetahui

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