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Culture

Rehia : le tressage, un art de vivre

Publié le 17 décembre 2021

Femmes de Polynésie rencontre Rehia pour parler de tressage, et revient avec une nouvelle manière d’appréhender la vie, à cheval entre tradition et modernité. En effet la jeune femme utilise un art ancestral pour confectionner les objets du quotidien et les promeut grâce aux réseaux sociaux. Au-delà du tressage, nous découvrons un véritable art de vivre.

LA MAGIE DU TRESSAGE

Regard lumineux, sourire éblouissant, Rehia Itchner tresse avec passion et fluidité.

« C’est magique d’avoir devant soi ses dix doigts, une simple palme de cocotier, et de réaliser plein d’objets ! »

Un enchantement que Rehia découvre à Huahine, il y a quatre ans. Elle est alors à la tête d’une société d’importation de fournitures hôtelières, mais le tressage s’impose brusquement dans sa vie. De retour à Tahiti, pendant six mois, elle n’arrête plus d’entrelacer entre elles des fibres végétales de niau1 ou purau2. Ailleurs dans les îles du triangle polynésien, le tressage se pratique en groupe : le savoir est vraiment donné. Ici, elle découvre qu’il en va autrement.

Non, Rehia n’apprend pas le tressage aux côtés d’une Mama3. Mais sur internet, grâce à des tutoriels qui n’ont rien de polynésien, puisqu’elle s’inspire même d’une vidéo brésilienne ! Chemin collatéral pour ramener le tressage d’avant vers les femmes polynésiennes d’aujourd’hui.

« Si tu es passionné, tu peux tout faire ! »

PARTAGE

Rapidement, Rehia propose des ateliers pour confectionner bols, plats, panières suspendues, éventails et chapeaux. Là aussi, Rehia se laisse surprendre.

« Je m’efface, les femmes échangent, partagent, créent un moment à elles. Parfois il y a des larmes pour vider un trop plein d’émotions. »

Les vahine pensaient leurs doigts maladroits, elles repartent avec un objet créé de leurs propres mains, juste avec une palme trouvée dans leur jardin ou au bord de la route. Plus tard elles peuvent recréer ce moment convivial entre amies, faire disparaitre un ennui improductif, ou même vendre leurs créations. Les femmes lui disent « merci ». Merci de les avoir rassemblées, merci de leur avoir donné de la fierté, de la confiance en elles.

TROQUER LE PLASTIQUE CONTRE LE VÉGÉTAL

Vous avez sûrement rencontré les affiches de la récente campagne ‘Ete4. La jeune femme qui pose est Rehia, pour promouvoir le végétal à la place du plastique.

Chez elle, Rehia tresse pour humaniser l’intérieur impersonnel de sa maison posée en fin de servitude. La vannerie chasse le plastique et embellit les objets du quotidien, on y retrouve des corbeilles, poubelles ou sacs tressés. Ses abat-jours rendent la lumière diffusée plus chaleureuse. Les décorations murales sont tressées comme des mandalas. L’univers végétal recouvre peu à peu le ciment, et prouve que l’on peut innover avec cet art ancestral !

« Je suis bien chez moi, grâce à tous mes objets. »

Chaque création est personnalisée, issue d’une palme à la forme unique.

« Quand je confectionne un objet, je pense à la personne à qui il est destiné, j’y mets de la bonne énergie. »

Tresser est un art qui lui vide la tête et occupe ses mains.

« Le tressage, c’est comme de la méditation. »

UN NOUVEAU MODE DE VIE

Au-delà de cet art, le tressage l’amène à redéfinir sa manière de vivre.

« Je me suis posée les bonnes questions. J’ai eu envie de subvenir à mes besoins sans impacter l’environnement, ou le moins possible. »

Mère de deux enfants, Rehia conserve pendant deux ans un mi-temps dans sa société qu’elle finit par vendre.

« Il y a eu un moment d’acceptation pour changer de vie, quitter mon confort, ce que je connaissais. Et rapidement, tout va bien mieux ! Mon chemin est tout tracé, j’avance avec confiance comme sur des pavés en équilibre au-dessus du vide. »

Cela la propulse hors du système, et l’expose aux regards souvent incompréhensifs de ses proches.

« Il ne faut pas attendre la reconnaissance de ses pairs. Il faut faire ce qui nous tient à cœur. »

Rehia a trouvé la cohérence. Avec son compagnon, elle s’installe à la lisière de la forêt, abandonne sa voiture, se tourne vers la permaculture et les conserves faites maison. Elle participe à la marche pour le climat et se lance pour un temps dans l’école à la maison.

« Je travaille juste pour mes besoins, on vit au jour le jour. »

Le soleil se couche, ciel et mer prennent des teintes pastel. Rehia rassemble ses objets tressés, repart vers sa maison riche de ses créations et de ses projets. Heureuse d’avoir osé s’écouter pour changer de vie.

1 Palme de cocotier

2 Écorce d’un arbre qui pousse en bord de cours d’eau

3 Femmes tahitiennes qui, grâce à leur expérience de vie, peuvent transmettre les traditions polynésiennes à la nouvelle génération

4 Campagne de sensibilisation sur les alternatives aux sacs plastiques en utilisant des paniers issus d’un savoir faire artisanal et culturel. Le ‘ete signifie « panier » ou « contenant » en reo tahiti

Doris Ramseyer

Rédactrice

©Photos : Doris Ramseyer pour Femmes de Polynésie

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